Radio-Techna, ma collection P.Horguelin (Fr) P.Horguelin (GB) Nomenclature des Radio-Techna Les composants Radio-Techna La production des Radio-Techna La distribution des Radio-Techna Le monolampe communal Paul Horguelin fait son cinéma Un "Grand Bonhomme" Annexes Remerciements | |
1/ Préambule : Les années d'apprentissage.
De 1916 à 1919, Paul Horguelin est élève ingénieur à l'Institut Agricole
de Beauvais. Parallèlement, il s'initie à la radio en assemblant et en
expérimentant des postes à galène (la lampe triode est encore dans le domaine
du secret défense). Appelé sous les drapeaux en 19, il effectue son Service
National à
la direction du matériel de la téléphonie (Compagnie des sapeurs-ouvriers à
Paris) puis dans l'armée française du Rhin (42e Bataillon du génie, fort de
Vaux) et enfin à la tour Eiffel. Il occupe alors une fonction de
"sapeur-radio". Il subsiste dans les archives Horguelin de nombreux témoignages photographiques de cette période.
De retour à la vie civile, il soutien une thèse le 12 juillet 1921 devant les délégués de
la Société des Agriculteurs de France, qui conclue ses études d'agronomie. Le thème en est "Projet d'installation hydro-électrique dans
une exploitation agricole". Selon J.Charlier (1), un atelier est
installé au début l'année 1922 dans une grange louée à Mr Noël. Paul Horguelin y
monte ses premières radios mais il n'est pas certain qu'il s'agisse des le
départ d'une activité commerciale. En effet, Paul Horguelin, comme
beaucoup d'autres au même moment, aborde d'abord la radio en tant que
radio-amateur. Sa station d'émission/réception restera en service de 1922 à 1927 sous l'indicatif
8BG (2). Les étapes de la construction d'une antenne géante, surnommée
"Tour Eiffel" par les villageois, ont fait l'objet de
nombreuses photographies dont certaines sont reproduites ci-après. A l'échelle d'un simple
amateur, cet ouvrage en fer apparaît comme réellement monumental. Il constitue
même la seule curiosité architecturale du village de Nuisement-sur-Coole
(hélas aujourd'hui en piteux état). Dans les premiers jours de fevrier 1922, Paul
Horguelin réalise une démonstration de TSF sur l'île de Guernesey, avec une
installation appartenant à Mr Cecil Falla. Il s'agit semble t'il de la
première réception réussie d'un radio concert de la tour Eiffel sur ce territoire
et l'évènement à fait l'objet de 3 articles dans la presse locale,
heureusement conservés dans les archives Horguelin. Rappelons qu'en
fevrier 1922 la tour Eiffel n'émet en phonie que rarement et de manière
aléatoire, simplement pour des essais (3). La maison que Paul Horguelin occupera
jusqu'a son décès est construite à l'automne de la même année sur un champ voisin acheté
à Madame Camus (1).
Paul Horguelin, adolescent, à l'écoute d'un poste à galène de sa
construction. L'appareil est relativement perfectionné puisqu'il comprend
3 bobines dont une tesla et 2 détecteurs (à la manière de certains
Péricaud à combinaisons multiples).
Sans permission, Paul
Horguelin a tendu une antenne entre l'école (ou il habite chez sa
mère institutrice) et le clocher de l'église afin de pouvoir capter
les signaux horaires émis depuis la Tour Eiffel. Ce type d'expériences sera
également mené en Angleterre lors de ses séjours linguistiques à la
maison des frères de St Gabriel, dans la banlieue de Londres. |
Né en 1899, Paul Horguelin a échappé de peu à la guerre de 14-18.
De par sa fonction de "sapeur-radio", il a aussi échappé en
partie à la "tenue de campagne". La photo ci-contre date
probablement de 1919, au moment des classes. |
Service Militaire, vers 1919/20. Paul Horguelin à son poste de travail. En
Haut à droite un ampli 3 ter, modèle d'état major. En dessous un ampli
indéterminé à 4 lampes, proche du modèle L1 (voir un exemple sur mon site).
Sur la table, un manipulateur morse spécial TSF et un récepteur indéterminé
avec étage détecteur à lampe.
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Service Militaire, vers 1919/20. Paul Horguelin à son poste de travail (à
gauche) avec un collègue. Récepteur à lampes indéterminé.
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Service militaire, vers 1919/20. Paul Horguelin à son poste de travail. En
Haut à droite un ampli 3 ter, en dessous un bobinage type Oudin.
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Service militaire, vers 1919/20. Le poste de travail de Paul Horguelin. A
gauche un ondemètre "La Précision Electrique" système Armagnat, au
centre une boite d'accord type Ferrié, à gauche un hétérodyne à 2 lampes.
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Service militaire, vers 1919/1920. Paul Horguelin à son poste de
travail. A gauche le même ondemètre que ci-dessus. Au centre une boite
d'accord Ferrié d'un autre modèle (sans Tesla coulissant), à
droite un hétérodyne à 2 lampes puis un ampli à 6 lampes type L1. |
Service militaire, vers 1919/1920. Un poste de travail de Paul
Horguelin. A gauche un récepteur 4 lampes CGR. Au centre un hétérodyne
à 2 lampes puis un émetteur 250 W Compagnie des Compteurs équipé
de 4 lampes à cornes. A droite un petit ondemètre Gaumont et un
manipulateur à bain d'huile spécial TSF. |
1922, la construction de la "Tour Eiffel". Le premier étage est
monté. Reste le plus difficile, hisser et dresser la flèche. Le jardin
de la propriété est tracé mais c'est encore un bourbier sans plantations.
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La flèche est hissée et assemblée sur un pivot au sommet du 1er étage.
les 2 barres métalliques en haut à droite serviront de levier lors de l'étape
suivante.
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L'étape critique. Les 2 barres métalliques sont reliées au sol par des
cordes, la flèche pivote lentement. La personne qui est restée en haut ne
manque pas de courage au vu du caractère périlleux de l'entreprise.
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La "Tour Eiffel" est dressée, prête à l'emploi. L'ouvrage mesure
environ 22 m si l'on considère que le personnage de gauche fait 1,65 m. En
1940, l'armée française puis l'armée allemande ont exigé le démontage du
fil d'antenne qui allait d'un pylône situé sur le toit de la maison jusqu'au
sommet de la tour. La flèche a été emportée par une tempête dans les
années 80, il ne subsiste plus aujourd'hui que le 1er étage.
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Les cartes QSL de Paul Horguelin
(source : Odette Escot). Au moment ou Paul Horguelin se saisi de
l'indicatif 8BG (en 1922), il n'existe en France qu'une petite trentaine
de stations amateurs (il est le premier utilisateur de cet indicatif qui
repassera de mains en mains plusieurs fois jusque dans les années 60) Il
n'est pas certain que la station de Paul Horguelin ai eu une grande
activité. Dans une liste des stations "en 8" publiée par La
TSF Moderne en janvier1923, 8BG est identifié à Nuisement sur Coole mais le nom
de l'opérateur est indiqué comme "inconnu" (alors qu'il est
connu pour 90% des stations de la liste). Ce simple fait suggère que les
contacts entre Paul Horguelin et les autres stations en 8 étaient rares.
Il ne faisait pas partie du réseau d'amis qui s'était constitué à
cette époque entre les premiers radio-amateurs. Il faut dire que ses
journées étaient sans doute déjà très occupées par son activité de
constructeur radio. L'indicatif 8BG a changé de main en 1927. |
A l'autre extrémité de l'allée qui mène à la "Tour Eiffel", la
maison de Paul Horguelin ( ici à l'époque de sa construction, divers
aménagements seront réalisés en 1923 et une extension
sera construite sur la droite en 1933/34). Il s'agit d'une
modeste maison de trois pièces dont la simplicité contraste avec le luxe des
magasins "Radio-Techna" qui seront crées dans les années suivantes
(voir page "La distribution des Radio-Techna). La première grange atelier,
louée au début de l'année 1922 et dont il ne subsiste aucune photo, se situait à proximité de cette maison.
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Cecil Falla, l'ami avec lequel Paul Horguelin à réalisé la première
démonstration de réception de la Tour Eiffel en février 1922 sur l'ile
de Guernesey. Selon un article
publié dans le "Guernesey Evening Press" du 7 juin 1962 à l'occasion
de leurs retrouvailles, Paul Horguelin et Cecil Falla s'étaient rencontrés en
1916 alors que le premier travaillait à la tour Eiffel et le second comme
opérateur de bord sur un navire (ndlr : la date est probablement fausse, en
1916 Paul Horguelin avait 17 ans). Ils avaient entretenu ensuite une
correspondance puis réalisé cette démonstration à la Castel Schools le 14
fevrier 1922 avec un récepteur appartenant à Mr Falla. Les auditeurs ont pu
entendre un radio-concert et une récitation des fables de la fontaine en
français. Ce concert par TSF était très attendu dans l'île et, bien que
l'accès à la salle soit payant au bénéfice d'une oeuvre caritative, il a
fallu rapidement installer des hauts parleurs dans des salles environnantes afin
de ne refuser personne. Cet évènement a eu un grand retentissement dans
la presse locale (voir reproduction d'articles en page annexes). |
2/ Les ateliers de Nuisement
La mémoire collective de la famille Horguelin retient le début de l'année
1922 comme le moment ou Paul Horguelin a commencé à fabriquer des récepteurs
de radio dans le but de les commercialiser. Il reste cependant très peu
d'informations sur cette première année d'activité (qui pourtant était bien
réelle dans la mesure ou l'entreprise avait déjà des salariés, Marguerite
Brisson entre autres à partir de septembre 22). On sait seulement, de sources
externes à la famille Horguelin, que les toutes premières radios Horguelin étaient
fabriquées pour le compte de la société SIDPE (Société Industrielle
d'Instruments de Précision et Dynamo-Phare Eyquem réunies) située 80 Boulevard Jourdan à Paris. La qualité de
construction était probablement déjà au rendez-vous puisque ces appareils ont
remporté le "Grand Prix" lors du concours de TSF organisé le 18 août
22 au Champ de Mars dans le cadre du concours Lépine. Il ne semble pas en revanche que la marque commerciale
Radio-Techna ai déjà été utilisée à cette époque par Paul Horguelin.
La société Radio-Techna est formée le 5 novembre 1922, 24 heures avant
l'inauguration officielle du poste Radiola-Radio Paris, premier émetteur radio
privé français (4). Il s'agit d'une société en nom collectif ayant pour
objet "la construction et la vente d'appareils électriques et
radio-électriques de précision" . Les actionnaires en sont Horguelin
Paul, Jolly René (Ingénieur des Arts et Métiers, domicilié à Nuisement), Carle
André (Radiotélégraphiste), Thomas Maurice (Radiotélégraphiste, fils du
chef de gare de Nuisement). A la suite d'un incendie, qui détruit entièrement
la grange atelier en janvier 23, Paul Horguelin entreprend
la construction d'un nouvel
atelier accolé à la maison d'habitation. Celui-ci est amplement documenté dans
les archives. Cet événement dramatique, survenu au tout début de l'activité,
a probablement
considérablement perturbé la production des premiers Radio-Techna.
Le
"laboratoire" de recherches de Paul Horguelin en 1922, avant la
création de la société Radio-Techna. De gauche à droite : bobine
Oudin, cadre type Roussel, boite d'accord, détecteur (modèle TM
standard), ampli HF, ampli BF. L'ensemble est de fabrication
"maison", entièrement réalisé avec des pièces de
récupération de la Télégraphie Militaire. Il ne s'agit pas encore de
réalisations destinées à la commercialisation (fabrication
contemporaine des récepteurs N°1 et 2 de la nomenclature). Au mur,
quelques photos du Service National. Une autre photo a été prise de
cette même table en 1924 (voir ci-dessous) qui permet de prendre la
mesure de l'évolution rapide de l'activité de construction radio. |
La première grange atelier était entièrement en bois et couverte de
tuiles. Une petite baraque en planches située à quelque distance
servait semble t-il à entreposer les accumulateurs destinés à
l'alimentation électrique du bâtiment car Nuisement n'était pas
encore raccordé au secteur. Cet atelier improvisé et sa
dépendance faisaient partie d'un ensemble de constructions comprenant aussi une maison
de maître et une écurie. L'ensemble a été racheté plus tard par Paul
Horguelin pour agrandir le jardin (sauf la maison de maître devenue entre-temps
un bureau de poste). En novembre 1922, l'équipement de l'atelier était
relativement conséquent. Il comprenait un tour, des machines "à
percer et à graver", une dynamo et un moteur à essence destinés
à la fabrication de l'électricité et tout l'outillage à mains, le
tout assuré pour 30000 F. A cela s'ajoutait les marchandises, pièces
détachées, appareils finis ou en cours de construction assurés pour
40000 F (archives Horguelin). Paul Horguelin connaissait bien la question de
l'alimentation électrique puisque c'était précisément le thème de
sa thèse de fin d'études soutenue un an plus tôt. Le moteur était
parait-il très bruyant et faisait dire aux habitants de Nuisement "Horguelin
va faire sauter le village" (discutions avec Marc Horguelin).
En l'état de la recherche j'ignore si l'électricité est pour
quelque chose dans l'incendie du 10 janvier. Comme on l'a vu à la page
nomenclature, il subsiste un doute quand au moment exact ou Paul
Horguelin a fait l'acquisition des diverses machines indispensables à
la réalisation d'appareils de qualité. En prenant pour point de
repère l'exposition du Champ de Mars et le concours Lépine, on suppose
que les machines étaient en place au plus tard au début de l'été
1922. |
Publicité légale de création de la société "Radio-Techna",
Journal de la Marne, 50 place de la République, Châlons-sur-marne. N°20991,
samedi 11/dimanche 12 novembre 1922, P3 (5). Le capital de la société est
de 65.000 F et elle est alors formée à compter du 5 novembre pour une durée de 5 ans. En fait, la
société est dissoute un mois plus tard, le 6 décembre 1922, pour des raisons
qui sont jusqu'a aujourd'hui inconnues. Outre le remboursement immédiat
des mises de fond, l'acte de dissolution prévoit qu'il soit versé à
Joly et Carle une somme correspondant à 6 mois de travail et à 4 mois
pour Thomas (Archives Horguelin). Il s'agit
peut-être d'un dédommagement mais le plus probable est que les 3
associés travaillent réellement dans l'entreprise avant que Paul
Horguelin n'embauche officiellement ses premiers salariés. En somme, Joly
et Carle (arrivés en Juin si l'on suit ce raisonnement) seraient les
monteurs des premiers postes Horguelin (Les appareils présentés à
l'exposition du champ de Mars à partir de juillet 22 sous la marque SIDPE).
Carle serait quand à lui arrivé en Août dans les mêmes conditions. La
vente des radios SIDPE au cours de l'été 22 rapporte sans doute quelques
bénéfices puisque Paul Horguelin est en mesure de recruter Marguerite
Brisson en septembre (et certainement d'autres salariés d'après ce que
l'on peut décrypter a travers l'examen de certaines pièces d'archives, mais je n'ai pas
d'informations plus précises sur ce point). Dans les jours qui suivent la dissolution de la
société, Paul Horguelin souscrit un prêt de 20000 Frs auprès d'Auguste
Robat, imprimeur à Châlons-sur-Marne. Cette somme permet le
remboursement des anciens actionnaires et la poursuite de l'activité
jusqu'a l'incendie de la grange atelier dans la nuit du 9 au 10 janvier
23. La production des Radio-Techna a été interrompue
ensuite durant une période assez longue, probablement jusqu'a l'inauguration du nouvel
atelier (mais il subsiste un doute sur ce point). Paul
Horguelin travaillera par la suite en nom propre jusqu'a la constitution de la
S.A.R.L. P. Horguelin et Cie en décembre 1930. A l'époque ou
l'entreprise Radio-Techna, à peine crée, connaît cette succession de
déboires, Paul Horguelin fréquente assidûment les Olivier, une grande
famille bourgeoise de la Champagne viticole. Leurs encouragements et
surtout leur soutien financier compteront semble-t'il pour beaucoup dans
la décision de reconstituer l'outil de production et de poursuivre
l'activité (discutions avec Marc Horguelin).
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Le nouvel atelier Radio-Techna vers 1924 (accolé à la maison, ce bâtiment existe toujours). Une large
baie vitrée distribue à l'intérieur la lumière du jour. Le local mesure
environ 10 m sur 6 m. Il s'agit d'une sorte de préfabriqué à charpente
métallique dont la réalisation a coûté 20000 F (compte batiments
1923, archives Horguelin) La maison d'habitation est juste derrière et l'on voit la
"Tour Eiffel" sur la gauche au bout du terrain. La propriété est
presque entièrement entourée de champs. La date d'inauguration de ce nouvel
atelier n'est pas connue très précisément. On lit dans le recueil de
souvenirs de Marguerite Horguelin les phrases suivantes : "Je
n'ai pas travaillé longtemps dans la grange, peut-être une saison. Un
matin, j'arrive pour travailler : Ah! tout était en cendres... Même la
machine à graver : le patron a dû en racheter une en Angleterre. Alors là,
on m'a dit qu'on ferait appel à moi à nouveau quand on recommencerait à
travailler. On a été trois ou six mois au chômage, je ne sais plus ; je
pense qu'on a recommencé à travailler l'hiver suivant. Dans ce temps là,
on n'était pas payé, mais ce n'était pas un problème...". Trois
mois, six mois, l'hiver suivant...celà situe la reprise d'activité entre
avril 23 et la toute fin de l'année. Je
serai tenté d'accorder un certain crédit à l'énoncé "l'hiver
suivant" qui traduit des sensations directement mémorisables
(aller travailler de bon matin dans le froid à bicyclette, sortir du
travail alors qu'il fait déjà nuit...) contrairement à la durée,
saisissable uniquement à travers les évènements mémorisés qui la
délimitent. Ici Marguerite Horguelin a la sensation d'une durée longue,
elle lance 3 mois, puis 6, puis identifie un repère quelconque qui n'est
pas directement énoncé mais là conduit à parler de l'hiver. On en
conclue que cet atelier a été inauguré au plus tôt en octobre ou
novembre 23 (quand il commence à faire froid, ou bien à faire nuit tôt,
ou bien quand les feuilles des arbres sont tombées...on bien toute autre
chose qui se rattache à l'hiver en général ou à cet hiver en
particulier dans l'esprit de la locutrice). Cette estimation est
confirmée dans l'opuscule "Histoire de vos maisons" de Jeanne
Charlier (1967) : "Entre mars et octobre, extension du local de
trois pièces (ndlr : la maison d'habitation) construction d'une
cuisine, d'une salle à manger et d'un atelier". On est tenté de
penser que la production des Radio-Techna a été entièrement interrompue
entre janvier 23 et l'inauguration de ce nouvel atelier. Cependant, un
document du 5 février 23 jette le trouble : "Il
va donc se réinstaller à Nuisement dans un petit local qu'il a fait
construire (ndlr : la maison de 3 pièces) sur un champ acheté par
lui près de la Poste et qu'il agrandira...il pense remettre son monde en
route le 15 février". L'auteur (sa mère) était peut-être un peu
optimiste mais cela indique que Paul Horguelin a eu au moins l'intention (mais
est-ce allé au delà de l'intention) de poursuivre l'activité dans sa
propre maison d'habitation. Quoi qu'il en soit, si quelques appareils ont
été fabriqués durant cette période, Paul Horguelin les a probablement
fabriqués seul puisque, selon Marguerite Horguelin "On (ndlr
: les salariés) a recommencé à travailler l'hiver suivant". Le
journal des ventes de Paul Horguelin, qui débute en mai 23, mentionne
quelques ventes entre mai et novembre : un poste vendu en mai pour 735 F,
un autre en juin pour 186 F mais rien de significatif avant décembre
(4699 F de ventes à la sté S.AF.I.R). |
La propriété Horguelin vers 1924, vue coté habitation. Le portail
monumental contraste avec la modestie de la maison. Au premier étage de la
"Tour Eiffel", un panonceau marqué "Radio-Techna". Une
salle d'essai, une salle d'expédition et un garage seront construits en 1926
pour un coût de 17390 F puis un garage, un grenier, une plate-forme et un
escalier en 1928 pour un coût de 21400 F (compte bâtiments, archives Horguelin)
|
Flavie Horguelin-Lallement, la mère de Paul Horguelin, est jusqu'en
1921 institutrice à Nuisement. Elle loge dans l'appartement de fonction
de l'école avec son fils. Après avoir pris sa retraite, elle déménage
de l'école et part s'installer chez une tante à Agen (on en reparlera à
la page "le monolampe communal"). Elle revient habiter à
Nuisement en avril 24 (la petite maison bâtie par son fils est maintenant
finie) Elle prend des lors une part active au fonctionnement de
l'entreprise en s'occupant de toutes les taches administratives et de la
correspondance avec les clients et les fournisseurs. Officieusement, elle
s'occupe aussi de faire régner la discipline et a fait aménager à cette
fin une petite fenêtre entre la maison d'habitation et l'atelier.
Marguerite Horguelin se souvient d'elle comme d'une personne juste mais
autoritaire. Flavie Horguelin-lallement décède le 1 janvier 1929. |
L'équipe de montage au complet, photographiée devant l'atelier de Nuisement
vers 1924-25. Au premier plan et de gauche à droite : Suzanne Renard, le
chien "Radio", Jean Laché, Geneviève Laché. Au second plan : Mr Vitry,
Marguerite Brisson, Paul Horguelin, "Le Châlonnais", Henri
Legrand (source : souvenirs de Marguerite Brisson-Horguelin retranscrits
par Paul Horguelin Jr)
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Intérieur de l'atelier vers 1924/25, l'équipe de montage au grand complet.
Les salariés monteurs étaient recrutés la plupart du temps sur place à
Nuisement. Au 1er plan Jean Laché .Au second plan on aperçoit la perceuse verticale. L'agencement comprend 3 rangées de tables. Au
fond à droite, l'espace consacré à la machine à graver.
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Intérieur de l'atelier vers 1924/25, l'équipe de montage au grand complet.
Vue prise depuis l'espace consacré à la machine à graver. Au 1er plan Mr Vitry, au second plan
Henry Legrand. |
Intérieur de l'atelier vers 1924/25, travail à la perceuse verticale. Au
1er plan "Le Châlonnais". Au
second plan un récepteur 2 lampes avec selfs amovibles qui semble être le N°32
de la
nomenclature. |
Intérieur de l'atelier vers 1924/25, travail à la perceuse verticale. Au
premier plan Suzanne Renard.
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Intérieur de l'atelier vers 1924/25, Mr Vitry au poste de contrôle des appareils. Physionomie
sérieuse, blouse blanche cachant chemise et cravate, le personnage ressemble
fort à un chef d'atelier. Le simple fait qu'il soit resté dans la mémoire de
Marguerite Horguelin comme étant Mr Vitry, autrement dit comme quelqu'un
que l'on appelle pas par son prénom, confirme qu'il s'agit bien d'une personne
à qui l'on doit du respect, donc d'un supérieur hiérarchique (au fait, il
s'appelait Gabriel). |
Paul Horguelin à son poste de travail, probablement en 1924. On reconnaît
l'amplificateur à 5 lampes HFC5, N°24 de la nomenclature, et la boite
d'accord N°24 bis. A droite, un autre Radio-Techna non identifié et une petite
boite d'accord à selfs amovibles à partir de laquelle P.Horguelin réalise des
essais. Au centre un pavillon col de cygne anglais "Amplion" à pétales bois,
un autre HP non identifié et un "microphone amplifier Brown"
qui a été retrouvé dans la succession Horguelin. Paul Horguelin sera pendant un temps
distributeur des HP Amplion et ne manquera pas d'en faire la réclame dans
ses diverses notices. |
Marguerite Brisson, future Madame Horguelin, devant la machine à Graver
Taylor-Hobson. Les façades de tous les appareils Radio-Techna ont été
réalisées avec cet appareil, importé d'Angleterre, qui permettait un travail
de très haute précision rarement égalé sur les récepteurs français
contemporains. Le talent de Marguerite Brisson est peut être aussi pour quelque
chose dans le résultat obtenu. Marguerite Brisson a été embauchée début
septembre 1922 en tant que graveuse. Il y avait donc bien à ce moment une
machine à graver dans la première grange atelier, avant même la constitution
de la société Radio-Techna. Cette machine, dont on ignore le modèle, a été
détruite dans l'incendie survenu dans la nuit du 9 au 10 janvier 1923. Paul
Horguelin a par conséquent du en racheter une autre (celle de la photo).
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La machine à graver telle que présentée sur le catalogue Taylor-Hobson
1922-23. Il s'agit d'un modèle "CB", acheté par Paul Horguelin 6222
F (compte machines, archives Horguelin). Taylor-Hobson est le principal fabricant anglais
pour ce type de machines, la société existe toujours aujourd'hui.
En plus de cette machine, l'atelier est équipé fin 1923 avec les
éléments suivants :
-1 Moteur à essence Pax 1,5 HP (2000 F)
- Système de transmission du moteur (458 F)
- 1 Moteur à essence 4 HP Poyaud destiné à la production de
l'électricité (3560 F)
- 1 perceuse électrique avec moteur CC (1033 F)
- Une scie à ébonite de marque Wellcome (533 F)
-Une batterie d'accumulateurs 30 volts 160 AH (1500 F)
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3/ La fin de Radio-Techna
A partir de 1929, la vie de Paul Horguelin connaît de profonds changements.
Le premier d'entres eux tient au décès de sa mère, Flavie Horguelin-Lallement,
qui jouait un rôle majeur dans le fonctionnement de l'entreprise et était
jusqu'alors la principale interlocutrice des fournisseurs et des clients. Le
second tient à son mariage avec Marguerite Brisson, l'une des ouvrières de
l'atelier. Le troisième tient à la naissance de son
premier enfant Paul Horguelin Jr en 1930 (Paul Horguelin aura 5 enfants). A
coté de ces évènements d'ordre privé (mais certainement non dépourvus de
conséquences dans la sphère professionnelle) l'entreprise Radio-Techna connaît
elle aussi des changements : Création d'une nouvelle société, développement
d'un réseau de distribution structuré en région Champagne, adoption de
l'enseigne Philips. Alors que l'activité de distribution semble prospère, Paul
Horguelin s'intéresse de moins en moins à la construction radio et renonce à
s'investir dans la moindre innovation . Les Radio-Techna des dernières années
sont toujours construits selon les "bonnes vieilles méthodes" :
Façades en ébonite, câblage en fil carré, alimentation par batteries,
haut-parleurs indépendants. En 1932 ces radios font figure de dinosaures face
aux nouveaux postes secteur à HP intégré, montés sur châssis métalliques
et câblés à la soudure. En 1933 ils sont devenus invendables. Après une
timide tentative de réalisation d'un récepteur "au goût du jour"
(voir le N°91.de la nomenclature), Paul Horguelin stoppe la fabrication des
Radio-Techna et brade ses derniers stocks, vraisemblablement au début de l'année
1934. Il restera propriétaire de son magasin de Châlons jusque dans les
années 60 mais ne l'exploitera jamais personnellement, laissant ce soin à des gérants. C'est alors
que commence pour lui une nouvelle aventure, celle de l'apiculture.
Le 15 décembre 1930, Paul Horguelin crée une S.A.R.L sous
la raison sociale "Paul Horguelin et Cie". Le capital social est de 50 000 frs et le siège est
situé non plus à Nuisement mais au 63 rue de la Marne à Châlons,
adresse d'un tout nouveau magasin Radio-Techna. Les actionnaires sont
Marcelle Brisson, sœur de Marguerite Brisson-Horguelin et gérante du
nouveau magasin, Raymond Jaeck, ingénieur et nouvel employé de Paul
Horguelin à Nuisement, Agnès Sydney Coryn demeurant à Londres et
Florence Billings demeurant à Hatfield, Massachusetts, USA. La présence
de ces 2 derniers noms est suffisamment étonnante pour qu'on s'y arrête
quelques instants. |
En
photo : Agnès Sydney Coryn (1894-1968), mieux connue sous son nom de
plume de Marjorie Coryn (ou encore "Gipsy" pour les intimes) est
une femme de lettre d'origine anglaise auteur de nombreux romans
historiques entre les 2 guerres ("Le Chevalier d'Éon", "Le mariage de Joséphine"
pour les plus connus). En 1917, alors qu'elle est établie à San Francisco,
les États-Unis entrent en guerre. Elle se
porte volontaire en même temps que sa mère pour rejoindre le front en
Europe. Elle est alors affectée à l'accueil des permissionnaires à la
gare de Châlons (en qualité d'infirmière) et fait rapidement connaissance avec Paul Horguelin, tout
juste 18 ans, qui ne tarde pas à lui faire la cour. Agnés Coryn est
bientôt reçue à Nuisement et devient une intime de la famille. La guerre finie "Gipsy"
quitte la France pour s'installer en Angleterre. Elle garde cependant des contacts étroits avec Paul
Horguelin durant toute sa vie.
Florence Billings (1879-1959), dont l'intimité avec la famille
Horguelin est moins clairement établie, était une collègue de Agnès
Coryn à l'accueil des permissionnaires de la gare de Châlons. Titulaire
de la Croix de Guerre en 17 elle a eu par la suite une vie digne d'un
roman en tant que représentante en Turquie du Near East Relief (NER), une
organisation humanitaire américaine crée en 1915 afin de venir en aide
aux réfugiés arméniens. Florence Billings était une interlocutrice privilégiée
de Mustapha Kemal Atatürk auprès duquel elle avait, dit-on, quelque
influence. Plus tardivement elle rencontrera Reza Khan Pahlavi, le futur
Shah d'Iran. Une biographie détaillée est accessible à l'adresse
suivante : http://asteria.fivecolleges.edu/findaids/sophiasmith/mnsss362_bioghist.html
Agnès Sydney Coryn et Florence Billings n'ont jamais contribué de près
ou de loin au fonctionnement de la société Paul Horguelin et Cie. Leur
présence en tant que sociétaires est liée à des raisons purement
amicales. Selon Marc Horguelin : "C'était peut-être aussi un
clin d'œil au monde anglo-saxon pour lequel Paul Horguelin avait de
l'attachement. C'était enfin une originalité parmi d'autres pour un
négociant de la Champagne "profonde"". |
Marcelle Brisson, sœur de Marguerite Brisson Horguelin, est également
actionnaire de la Sté Paul Horguelin et Cie. Elle occupera la fonction de
gérante du magasin de Châlons jusque au début des années 60.
Le 5ème associé, Raymond Jaeck, est un employé de Paul Horguelin à
Nuisement. Il a été embauché en 1928 d'après les souvenirs de
Marguerite Horguelin et n'est pas semble t'il un simple monteur puisqu'il
est qualifié du titre "d'ingénieur" dans le certificat de dépôt
de la société. Raymond Jaeck quitte l'entreprise quelques temps plus
tard pour fonder un magasin de radio
concurrent. |
Cette
photo de l'atelier a été prise en septembre1932, au moment de la réalisation du
film sur Radio-Techna (mais elle n'est pas extraite du film). En dehors de
Paul et Marguerite Horguelin on ne reconnaît plus aucun des membres
de l'équipe de 1924. A gauche de la photo, Paul Horguelin Jr, 2 ans, se
"fait la main" sur un "vieux poste" à selfs
amovibles. A droite, à la table de travail, Gilbert Millard (embauché en
27 ou 28), René Garneaux et Jean Thibault ( avec une dose d'incertitude
pour les 2 derniers). Au fond en blouse blanche, le frère Louis de la
maison des frères de St Gabriel à Londres (embauché en 27 en qualité
de superviseur de l'atelier mais qui en principe ne travaille plus à
Nuisement en 32). La photo a vraisemblablement été
prise par Henri Defaix, le gérant du magasin d'Epernay, qui participe
aussi à cette scène dans le film. Les protagonistes semblent affairés
au montage d'une série de postes Super5. En fait, il s'agit très
largement d'une mise en scène. René Garnaud est le jardinier de Paul
Horguelin, Jean Thibault est
une sorte "d'homme à tout faire" de la maison (il deviendra
plus tard technicien Api-Techna). Ni l'un ni
l'autre n'ont semble t'il travaillé au montage des Radio-Techna. Au
moment ou est prise la photo, l'atelier fonctionne avec une équipe très
réduite, certainement plus pour assurer le S.A.V que pour fabriquer de
nouveaux appareils. On sait par les souvenirs de Marguerite Horguelin que Mr Vitry et Henri Legrand travaillent toujours à
Nuisement en 1929, mais plus Geneviève Laché. Le registre de la
comptabilité ménage pour les années 1928/1934, retrouvé en 2009,
indique les noms des ouvriers qui "prennent pension" à
Nuisement pour le repas de midi. En 1928 on trouve Robert Millard et
Raymond Jaeck. En mai 29, Raymond Jaeck part au service militaire et on
trouve un nouveau venu en la personne de Mr Vincent, arrivant de Londres
(une lettre semble indiquer que cette personne avait déjà des relations
commerciales avec Paul Horguelin auparavant -voir page composants-). Mr
Vincent disparait du registre en decembre 1930. En 31 et 32 on retrouve 3
pensionnaires : Raymond Jaeck, Robert Millard et René Garneaux (le
jardinier). Jaeck disparait de la liste en janvier 33 (il est parti pour
fonder sa propre entreprise). Robert Millard, le dernier ouvrier monteur,
quitte à son tour l'atelier en février 34. |
Le 12 septembre 1932, Paul Horguelin organise un grand repas à
Nuisement pour fêter les 10 ans de "Radio-Techna". Les hommes
de la photo sont, de gauche à droite : André Mourlane (ami de chasse et
revendeur à Montflanquin), Stephen Grignet (revendeur à Fourmies),
Albert Lallement (revendeur à Agen), Henri Defaix (gérant du magasin d'Epernay),
Mr Cazals (des champagnes du même nom, ami de la famille) et bien sur
Paul Horguelin (tenant dans ses bras son fils Marc Horguelin). |
Une autre photo du même évènement. Les personnages entourant Paul
Horguelin sont à gauche Albert Lallement et à droite Cecil Falla. Les
autres protagonistes ne sont pas identifiés. Le pavillon Amplion a
été retrouvé dans la succession Horguelin. |
Le menu du repas du 12 septembre 1932, dans lequel Paul Horguelin a
ajouté une note d'humour (Exemplaire d'Albert Lallement, Source Odette
Escot). |
Nous sommes ici probablement fin 1933 ou au début de 1934. Paul Horguelin solde ses
vieux stocks : des Radio-Techna à 4 ou 5 lampes entre 400 et 600 frs
complets en ordre de marche (c'est moins que le prix nu quelques années
plus tôt), des Philips sans HP intégré (devenus eux aussi obsolètes),
des postes batterie divers (SFER, Evernice, Ducretet). (source : archives
Escot) |
Le grand rucher de Nuisement, construit en 1935, marque le départ de
la nouvelle carrière de Paul Horguelin. Ce bâtiment, qui existe
toujours, inaugure une technique inédite de production du miel. |
4/ Quelques Radio-Techna en revue
Les postes Radio-Techna sont invariablement câblés en fil carré étamé
(une seule exception pour l'appareil N°11 de la nomenclature câblé en fil de
cuivre rond non étamé, mais il est
possible qu'il ait été re câblé), assemblés avec oeillets et boulons comme
il était de tradition dans les années 20. Paul Horguelin faisait parfois usage
de la soudure mais de manière très limitée.
Ce point mis à part, les appareils présentent une très grande disparité
dans leurs principes de construction. Certains récepteurs des premières
générations sont entièrement assemblés sur la façade. Il suffit d'enlever
les 4 ou 6 vis présentes sur cette dernière pour désolidariser le poste de
l'ébénisterie. D'autres appareils se présentent sous la forme d'un châssis
en bois solidaire de la façade et incluant l'ensemble des composants. Ce châssis
est simplement glissé dans l'ébénisterie et peut en être retiré moyennant
très peu de démontages. D'autres enfin sont assemblés directement dans
l'ébénisterie. La base, mais aussi souvent les cotés et parfois le dessus de
la boite, sont autant de supports pour les composants de l'appareil.
Désolidariser le poste de son ébénisterie suppose alors de tout
démonter.
D'un récepteur à l'autre, le soin apporté à l'étude et la qualité de la
réalisation sont très variables. La plupart des radios construites avant 1927
sont très proprement câblées mais si certaines sont manifestement pensées à
l'avance, d'autres relèvent d'une construction très empirique dans laquelle
Paul Horguelin ne s'est manifestement pas autant investi. A partir de 1928-29
(la génération des superhétérodyne) les Radio-Techna relèvent d'une
construction routinière. Les appareils sont pour la plupart correctement
étudiés mais leur qualité de fabrication baisse considérablement. Les postes
de cette époque se situent juste dans l'honnête moyenne des constructions
françaises contemporaines (Rappelons que l'équipe de montage n'était plus la
même qu'en 24 et que Flavie Horguelin , la mère de Paul Horguelin, n'était
plus là pour surveiller la qualité du travail)
N°12 de la nomenclature, monolampe "communal" (1924).
L'appareil était destiné à être présenté à un concours en vue de
l'obtention d'un marché public (voir page dédiée). Aussi a t'il été
étudié avec le plus grand soin. L'ensemble des composants est fixé à
la façade et implanté d'une manière parfaitement rationnelle facilitant
les éventuelles interventions (sur ce type d'appareils les causes de
pannes sont quand même très limitées). Le câblage fait appel à la
soudure à quelques endroits visibles sur la photo.
|
N°42.de la nomenclature, 1HF/Det/2BF (1925-26). Au niveau des
principes de fabrication, il s'agit d'une sorte d'extrapolation du
monolampe amplifié. L'implantation des composants entièrement sur la
façade semble là aussi très étudiée. Paul Horguelin a tenté de
reproduire ces principes sur les appareils haut de gamme à 5 lampes de la
même époque (N°32/33/34/35.) mais il n'y est que partiellement parvenu
puisque dans ce cas les transfos sont fixés à une planche rapportée à
l'arrière.
|
N°52.de la nomenclature, Technadyne modèle "spécial" 2HF/Det/2BF,
résonance neutrodyne (1926). Le câblage est très propre mais l'appareil
est beaucoup moins pensé que les précédents. 3 cotés de la boite
servent à fixer les transfos et les selfs. L'accessibilité aux
composants est cependant excellente puisqu'il suffit de démonter la base.
Les selfs sont montées sur des rond d'ébonite usinés à cet effet.
|
N°77.de la nomenclature, genre Supertechnadyne, 6 lampes
Superhétérodyne (vers 1927-28). L'un des appareils les moins bien
conçus de la production Radio-Techna. Les cotés et le socle servent à
fixer l'ensemble des composants et la boite n'est pas démontable, rendant
les interventions problématiques. La position des selfs induit des
couplages involontaires qui affectent le fonctionnement de l'appareil.
J'ai cru un moment que ce type de montage était réservé à des modèles
"spéciaux", c'est à dire à des postes fabriqués en 1 seul
exemplaire sur commande spéciale et pour lesquels Paul Horguelin avait
économisé sur le temps d'étude. Pourtant, on retrouve une disposition
comparable (quand même un peu moins dramatique) sur certains appareils
qui sont incontestablement de série et même parfois relativement
précoces (N°38/43/44.de la nomenclature).
|
N°59 de la nomenclature, modèle B4, Superhétérodyne 4 lampes (vers
1927-28). Il s'agit d'un appareil de série (presque grande) qui a
manifestement fait l'objet d'une étude. Le câblage est plutôt moyen.
L'ensemble du poste est monté sur un châssis en bois qui se
désolidarise facilement de l'ébénisterie (voir le film Radio-Techna
pour le montage des châssis dans les ébénisteries) . On retrouve cette
disposition sur de nombreux appareils : B5, Super 5 / la plupart des
Technadyne et Supertechnadyne. Il semble que ce type de construction ai
été inauguré en 1924 sur les modèles 4 lampes en coffret (N°20/21/22/23
de
la nomenclature) mais dans ce dernier cas la qualité de réalisation est
infiniment supérieure.
|
N°79 de la nomenclature. Modèle "Super-Technadyne",
Superhétérodyne 6 lampes (vers 1927-28). Il s'agit d'un appareil de
très haut de gamme, vendu 2650 Frs nu dans cette version avec
ébénisterie de luxe à rideau coulissant. Le soin apporté au câblage
est manifestement bien supérieur à l'appareil ci-dessus. Paul
Horguelin réservait certainement beaucoup plus d'attention à ces
modèles coûteux destinés à une clientèle aisée et
exigeante. |
5/ A propos du logo et du nom "Radio-Techna"
Le logo imaginé par Paul Horguelin pour sa marque "Radio-Techna"
est particulièrement sophistiqué et original. Comme on a pu le voir dans la
nomenclature, les tout premiers appareils construits en 1922 présentent un
modèle simplifié. Un logo différent mais de même inspiration est présent
sur les récepteurs portant la marque Radio-Parfait. Enfin, un graphisme
différent est adopté en 1927 pour le logo figurant sur les voltmètres.
Le logo des tout premiers Radio-techna de 1922. Les flèches et la
représentation de l'Europe sont encore absentes. Je ne possède aucune radio
avec ce logo, il s'agit là d'un scan à 700% d'une photo des archives Horguelin
(N°8)
|
Une seconde version de logo primitif. On aperçoit la représentation de l'europe
mais il n'y a toujours pas de flèches. Scan à 700% d'une photo des archives
Horguelin (N°9)
|
Le logo définitif, tel qu'il sera présent sur la plupart des Radio-Techna
de 1924 à 1932. Ici photographié sur une radio tardive. Le trait à la fois
fin et profond est obtenu grâce à la machine à graver Taylor-Hobson. Sur
certaines radios (par exemple les "Technadyne" de 1ère génération,
ce logo est absent. Il est simplement écrit "constructions Radio-Techna"
en lettres bâton en bas à gauche. Dans ce cas, "Technadyne" devait
se substituer à "Radio-Techna" en tant que marque commerciale).
|
Ce logo figure sur le papier à entête de la société en 1924, sur les 2 planches "gamme 1925/26" et on le retrouve
sur les voltmètres des récepteurs "Technadyne" et assimilés à
partir de 1927 (Il s'agit de voltmètres "Chauvin et Arnoux", comme
ceux utilisés sur les postes antérieurs, mais le marquage "Chauvin et
Arnoux" fait place à un marquage "Radio-Techna". Chauvin
réalisait fréquemment ce type de travail à façon, voir par exemple sur les
postes Vitus contemporains). |
Ce logo "Radio-Parfait" figure sur 2 appareils connus (dont
un dans ma collection, N°22) d'aspect identique à des modèles de série "Radio-Techna"
(1924 et 1927). La forme générale est identique au logo "Radio-Techna"
mais la représentation de l'Europe est remplacée par les initiales ACE
(l'ordre n'est pas certain). Pour l'instant je ne dispose d'aucune
information pour éclairer ce point. |
Le magnifique logo présent sur l'ébénisterie du poste "SAFIR
PHL5 Violina" n'est probablement pas l'œuvre de Paul Horguelin.
Que son auteur soit remercié. Sans ce logo je n'aurai certainement pas
fait le rapprochement entre l'ébénisterie vide à vendre sur Ebay en
janvier 2009 et mon châssis. |
En 1922, les radios anglaises et américaines sont totalement inconnues en
France. Pourtant elles ne sont certainement pas étrangères à Paul Horguelin
qui, on l'a vu, se déplaçait régulièrement en Angleterre et avait mème eu
un temps le projet de s'établir de l'autre coté de l'atlantique (ce que l'un de
ses fils fera plus tard). Aussi original qu'il soit en apparence, le logo
Radio-Techna rappelle pourtant étrangement un autre logo beaucoup plus
célèbre, celui de RCA, le plus important constructeur de radio américain à
cette époque. Le logo RCA "Worlwide-Wireless" a été déposé en 1920, soit très peut de temps avant que Paul Horguelin ne débute son
activité. Nul doute que dans la société procédurale qui est la notre
aujourd'hui, Paul Horguelin aurait reçu la visite des avocats de RCA à un
moment ou à un autre.
Le premier logo RCA "World Wide Wireless", utilisé à partir de
juin 1920 (5). La similitude est flagrante avec le premier logo Radio-Techna
sans flèches. Bien entendu, la représentation de l'Amérique fait place à une
représentation de l'Europe dans le cas de Radio-Techna. |
Second logo RCA "World Wide Wireless", utilisé de mai 1921 à
décembre 1923 (5). Les flèches ont fait leur apparition, elles sont ici
tournées vers le bas.
|
Le nom commercial "Radio-Techna" semble bien être l'invention de
Paul Horguelin. Au cours de mes recherches à Nuisement, j'ai retrouvé dans un
vieux cahier une série de dessins, datant de l'époque de la création de la
société, qui attestent d'une réflexion portant autant sur le nom de
l'entreprise que sur le graphisme du logo. Pour autant, Paul Horguelin n'est pas
le seul à avoir fabriqué des postes "Radio-Techna", ce qui n'est pas
parfois sans provoquer quelques confusions.
Les plus célèbres des postes "Radiotechna" ne sont pas
français mais tchèques. "Radiotechna" (en un mot) est le nom
commercial donné en 1929 à la filiale praguoise de Siemens. Cette compagnie a
produit de nombreuses radios jusqu'a la guerre sous licence Téléfunken dans
son usine de Prélouc. En 1945, "Radiotechna" est entré dans le giron
de Tesla. Jusqu'a preuve du contraire, il ne faut voir dans cette homonymie
qu'une simple coïncidence.
Beaucoup
plus troublant est le cas de "Techna-Radio", un petit
constructeur/monteur de "postes à oreilles" et assimilés,
établi à la fin des années 40 au 54 de la rue Marius Aufan à
Levallois-Perret. Comme on le comprend de manière évidente en examinant
le logo reproduit ci-contre (aimablement fourni par un
collectionneur), le constructeur des "Techna-Radio" connaissait
les "Radio-Techna" ou leur concepteur. Il n'a malheureusement
pas été possible jusqu'a présent d'établir le lien.
|
6/ Les volumes de production
Combien Paul Horguelin a t'il fabriqué de radios ? Pour avoir personnellement re câblé
quelques récepteurs de cette époque lors de travaux de restauration je
sais que ce travail est long et fastidieux, surtout quand on recherche un
résultat irréprochable. Personnellement, j'estime que le montage d'une radio
de complexité moyenne demande au moins 2 jours de travail à un câbleur
qualifié, moins quand cette radio est fabriquée en série et que le fil de câblage
rigide est préparé à l'avance, sensiblement plus quand il s'agit d'un modèle
unique et qu'il faut tout faire "sur la bête".
Comme on l'a vu, certains Radio-Techna ont été fabriqués en (petite)
série. C'est le cas des types B4 et Super 5, c'est le cas encore du monolampe
communal et du 4 lampes en coffret de 1924. Pour ces modèles il est probable
que le travail était préparé à l'avance et le montage facilité.
Pour d'autres modèles en revanche, la tâche était certainement plus
fastidieuse. Imaginons le cas d'un "Technadyne", dont on a vu dans la
nomenclature qu'il se décline en une multitude de versions. Paul Horguelin
reçoit 5 ébénisteries identiques et entreprend le montage de 5 "Technadyne"
au schéma identique suite à une commande. Au bout du 3ème il est en rupture
de stock de transfos car il a du utiliser ceux qui restaient pour dépanner un
client. Il doit employer un autre modèle de transfos donc le câblage préparé
à l'avance ne correspond plus et il faut bricoler. Au bout du 4ème, il n'a
plus de voltmètres car Chauvin et Arnoux ne l'a pas livré malgré des
promesses répétées. Il doit en tenir compte pour la fabrication des 2
dernières façades sur lesquelles il devra mettre un voltmètre différent. Le revendeur
est satisfait (il connaît les aléas de la fabrication) et il passe une
nouvelle commande de 2 appareils mais comme il n'y a plus d'ébénisteries et
que l'ébéniste de Château-Thierry est surchargé de travail, il faut
utiliser pour ces derniers une boite 10 cms plus longue dont plusieurs
exemplaires sont encore en stock à Nuisement ....ce qui implique de
revoir la distribution des composants sur le façade et la longueur des fils....
. Au total on est plus près de l'artisanat que du Taylorisme. 7 appareils
identiques commandés, 4 "modèles" différents livrés.
Considérant que Paul Horguelin disposait de 6 ouvriers câbleurs au plus fort
de son activité (on ne compte pas Marguerite Brisson qui était préposée à la
gravure), qu'un ouvrier passait en moyenne 2 jours sur un appareil et
travaillait 6 jours par semaine, on peut estimer la capacité de production
totale à 6x3=21 radios par semaine, soit 21x52= 1092 radios par an, à supposé
qu'aucun ouvrier ne prenne jamais de congés ou ne soit malade. En se
tenant à la période 1924/1930 (avant et après la production semble
anecdotique), on arrive au chiffre maximum de 1092x7=7644 radios potentiellement
produites.
Au cours de mes conversations avec Marguerite Horguelin, j'ai tenté
d'obtenir des réponses par un autre biais en posant la question "Combien
de temps cela prend t'il pour graver une façade?". Selon Marguerite
Horguelin, la machine Taylor Hobson permettait de graver environ 2 à 3 façades
par jour. En prenant pour base de calcul 2,5 on arrive à 2,5x6=15 façades par
semaine soit 15x52=780 par an et 780x7=5460 radios sur la période de
référence. Il faut remarquer que la machine était en pratique parfois
mobilisée pour d'autres taches que les façades, par exemple la gravure des
condensateurs, qui jusqu'en 1925 étaient des fabrications "maison". Il faut remarquer aussi que les radios tardives disposaient de
beaucoup moins de commandes que les premières, ce qui réduisait d'autant le
temps de gravure.
A travers ces petits calculs on peut dire que la capacité de production de
Paul Horguelin sur la période de référence (1924/30) a été certainement supérieure
à 5000 appareils et aussi certainement inférieure à 10000. Reste qu'on ne parle
pour l'instant que de capacité de production. Pour produire il faut aussi
vendre et rien ne permet à ce niveau d'affirmer que les ateliers ont toujours
tourné au maximum de leur capacité.
On est relativement démuni pour cerner le nombre de radios effectivement
vendues par Paul Horguelin. Faute de mieux, je suggérerai dans un premier temps
une méthode
passablement contestable du point de vue épistémologique car elle suppose de
retenir certains présupposés qui sont, par définition, totalement invérifiables en l'état de la recherche.
Paul Horguelin attribuait à certaines radios un N° de série. C'est le cas
du type B4 dont je possède 3 exemplaires, dont 1 tardif pourtant le N°840
(N°60 de la nomenclature). Considérons
que ce numéro est sincère (ce qui est plausible dans la mesure ou Paul
Horguelin n'hésitait pas à utiliser des petits numéros sur d'autres séries
-voir mes types "Communal"-) et que
mon poste est vraiment un des derniers de cette série. Depuis 1991, j'ai recensé
au total 7 type B4 dans les collections soit 0,83% d'une production totale
présumée de 840 appareils environ. Si l'on considère maintenant que le
taux de découverte d'un type d'appareil particulier est proportionnel aux
volumes effectivement produits, que je n'ai eu ni chance particulière, ni
malchance aberrante dans la quête de ce modèle par rapport à la quête
d'autres modèles Radio-Techna, on peut en déduire que 17 années de recherches
m'ont conduit à exhumer environ 0,83% de la production de Paul Horguelin. Les
appareils recensés fin 2008 sont au nombre de 53 ce qui nous donne
53/0,83x100= 6385 appareils produits. Ce nombre se recoupe relativement bien
avec l'estimation de la capacité de production réalisée plus haut. Je
n'aurais sans doute jamais les moyens de vérifier les présupposés initiaux
de ce calcul (la sincérité des N° de série). En revanche, la variable taux de découverte est amenée
à s'affiner avec le temps et les découvertes futures. Il est probable que dans
un siècle ou deux on sera en mesure de réaliser une estimation plus sérieuse,
pour l'instant considérons ce paragraphe comme un simple jeux. Il faut
remarquer que si l'on applique aujourd'hui le même raisonnement au monolampe
"communal", dont 5 exemplaires sont recensés de manière certaine (N°2,13,30,36,60), on
obtient un taux de découverte de 8,33% complètement aberrant au regard des
estimations réalisées plus haut puisqu'il faudrait alors considérer que la
production totale des appareils Horguelin ne dépasse pas 600 pièces en 7 ans
(6).
Certaines archives comptables de Paul Horguelin, retrouvées en 2009, offrent
un autre biais pour saisir le niveau d'activité de l'entreprise. Le tableau
ci-après présente ainsi l'évolution du chiffre d'affaire entre 1923 et
1932. Il faut noter cependant que de nombreux facteurs rendent problématique
l'établissement d'une corrélation entre le chiffre d'affaire et les volumes de
production : Le prix de vente des appareils n'est bien entendu pas le même
suivant qu'il s'agit de ventes directes ou de ventes aux revendeurs, le chiffre
d'affaires inclue la vente de produits autres que des récepteurs
Radio-Techna (accessoires tels batteries, cadres, câbles de liaison,
haut-parleurs Amplion et Celestion qui étaient distribués par Paul Horguelin,
postes Philips qui représentent une part sans cesse croissante des ventes à
partir de 1928 et en représentent certainement l'essentiel en 1932, postes
d'autres marques tels "Strobodyne", Merlaut et Poitrat... qui figurent
en nombre dans un inventaire réalisé en 1930). Enfin, il est possible qu'une part
des ventes ne figure pas dans les comptes
mais on n'est pas en mesure d'en évaluer la proportion. Si on considère que le
prix moyen de vente d'un appareil Radio-Techna sur l'ensemble de la période
considérée est de 500 F (équivalent du prix public du monolampe communal en
1925), le chiffre d'affaire total réalisé entre 1923 et 1932
représente l'équivalent de 5410 appareils Radio-Techna. Pour s'approcher de la
réalité il faudrait pouvoir retrancher toutes les ventes autres que
Radio-Techna (inconnue) et rajouter la part hypothétique de ventes Radio-Techna
non inscrite dans les comptes (inconnue). En se limitant à la période 1924/1927 (ou le poids de
la première inconnue est nécessairement beaucoup moins lourd, voire
négligeable, puisque Paul Horguelin
n'est pas encore concessionnaire Philips) on obtient un total de 1723 "équivalents
monolampe communal" soit une moyenne de 430 appareils par an. Rapporté à
la période 1924/1930 (que j'ai retenue au début de la démonstration) et en
tablant sur une production constante sur l'ensemble de la période, le
volume de production des Radio-Techna pourrait ainsi avoisiner
les 3010 unités (430x7). Selon toutes probabilités, et
quel que soit le poids de la seconde inconnue, la réalité est donc
sensiblement inférieure aux chiffres cités plus haut. Elle pourrait se
situer dans une zone allant de 2500 à 5000.
ANNÉES |
CHIFFRE D'AFFAIRES |
ÉQUIVALENT MONOLAMPE |
ÉQUIVALENT EURO 2008 (7) |
1923 (de mai à décembre) |
29.192 |
58 |
27.923 |
1924 |
67.567 |
135 |
56.552 |
1925 |
253.692 |
507 |
198.179 |
1926 |
251.776 |
503 |
171.609 |
1927 |
289.246 |
578 |
165.330 |
1928 |
311.040 |
622 |
177.787 |
1929 |
405.624 |
811 |
218.525 |
janvier à juin 1930 |
240.547 |
481 |
128.120 |
juillet 1930/juin 1931 |
559.488 |
1.118 |
297.994 |
juillet 1931/juin 1932 |
297.006 (Note de P.H : "c'est la crise") |
594 |
165.723 |
Les chiffres affichés sur ce tableau confirment de manière éclatante les
discutions que j'ai eu avec Marguerite Horguelin dans les années 90. Si le
chiffre d'affaire de l'entreprise fait un bond considérable en 1925, il stagne
les années suivantes (voire régresse si l'on tient compte de l'inflation
galopante qui caractérise ces années) pour ne re-décoller ensuite réellement
qu'en 1929, à l'époque ou Paul Horguelin prend la concession Philips. Eu
égard aux coûts d'exploitation (7 salariés monteurs quand même) l'entreprise
de construction des appareils Radio-techna est probablement d'une rentabilité
médiocre. Elle est ou bien trop grande (de nombreux "constructeurs"
travaillaient seuls sur la table de leur cuisine et ils ont survécu comme cela
jusque dans les années 50) ou bien trop petite (et donc incapable de réaliser
des économies d'échelle). Dans le contexte de la grande crise économique, qui
frappe réellement la France à partir de 1931, la décision de passer à autre
chose est donc très compréhensible. De nombreux constructeurs radio ont mis la
clé sous la porte à la même époque et parmi ceux-ci bien peu ont su rebondir
comme l'a fait Paul Horguelin.
7/ Epilogue : Les vestiges de l'atelier
Au décès de Paul Horguelin, beaucoup d'anciens appareils ont été jeté
dans une décharge sauvage située à proximité de la gare de Nuisement,
aujourd'hui transformée en lotissement. Fort heureusement, cette entreprise de
destruction du passé n'a pas été jusqu'a son terme et c'est avec un certain
émerveillement que j'ai découvert ces lieux en 1999, tel Howard Carter ouvrant
la tombe de Toutankhamon. Au delà des archives papier et des quelques postes
Radio-techna survivants, les traces de l'atelier Horguelin sont partout. Ci
après, un florilège de quelques unes de mes découvertes.
Enseigne peinte de l'entreprise, initialement fixée au 1er étage de
la Tour Eiffel. 2m x 1m. (collection Verdier, succession Horguelin). Je
suis preneur de tous conseils en vue de restaurer du mieux possible cet
élément d'histoire. |
Même amputée de son premier étage, la "Tour Eiffel"
reste un ouvrage imposant. C'est la première chose que l'on découvre
en s'approchant de la propriété.
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La présence de nombreuses plaques émaillées de ce modèle dans
divers endroits de la propriété semble indiquer que Paul Horguelin
était probablement un peu plus qu'un "membre agréé". On
sait qu'il a occupé de hautes fonctions syndicales dans le domaine
Apicole et il n'y aurait rien d'étonnant à ce qu'il se soit également
préoccupé de ces questions dans le domaine de la Radio-Electricité.
Ce point demeure à creuser. |
Divers appareils parmi d'autres retrouvés à Nuisement (collection Verdier,
succession Horguelin) :
-Brown microphone Amplifier (visible sur une photo des ateliers)
- Voltmètres et ampèremètres divers.
- Lampemètre, fabrication maison (années 40) à partir de pièces
de récupération Radio-Techna (modèle B4 en version pupitre). |
-Sullivan standard wavemeter (GB) 1920
-Voltmètre et ampèremètre Chauvin et Arnoux
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Pont à condensateurs Dr G Seibt (A) 1917.
Marconi MK3 short waves tuner 1917 (boite vide, une autre boite de même
type a été utilisée en 1922 pour réaliser un monolampe, voir N°3 de
la nomenclature) |
Épave de pavillon Amplion géant destiné à la sonorisation. Visible
sur une photo du 10ème anniversaire (voir ci-dessus)
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Le tableau électrique de l'atelier.
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La pointeuse de l'atelier, encore utilisée dans les années 60 à
l'époque d'API-TECHNA. |
Un gag pour finir : ébénisterie de monolampe communal transformée
en boite à "mannes". Pour les rares personnes qui
ignoreraient le sens de ce mot, la "manne" désigne en patois
champenois une petite espèce de mouche qui vole au raz de l'eau et
constitue une nourriture de choix pour les truites. Paul Horguelin
utilisait des "mannes" pour appâter quand il pêchait dans la
Coole, la rivière qui passe à proximité de Nuisement. |
(1) J.Charlier "Histoire de vos maisons", Nuisement 1967 (Archives Horguelin).
(2) Musée.ref-union.org, Service Historique (Information communiquée par
Marc Horguelin).
(3) René Duval, "Histoire de la radio en France", P94, ed Alain
Moreau 1979. (4) René Duval, "Histoire de la radio en France", P42.
La naissance du poste Radiola marque la véritable naissance de la
radiodiffusion en France. Jusqu'a présent seul le poste FL disposait de
l'autorisation d'émettre et ne proposait pas véritablement de programmes. Au
delà de l'anecdote, la coïncidence des dates avec la création de la Société
Radio-Techna montre le caractère extrêmement réactif de Paul Horguelin. (5) Eric P.Wenaas, "The
golden age of RCA, 1919-1929", Sonoran publishing LLC, 2007. P31. (6) Ce
paragraphe a été rédigé entre décembre 2008 et juillet 2009, il ne tient
donc pas compte des découvertes réalisées depuis. (7) Source INSEE : http://www.insee.fr/fr/indicateurs/indic_cons/pouvoir_achat.pdf
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