Le récepteur Popoff-Ducretet Histoire d'une restauration Généalogie des cohéreurs Ducretet | |
L'histoire de la maison E. Ducretet a déjà fait l'objet de très sérieux
travaux de recherche, en particulier la remarquable étude de Jean Claude
Montagné : "Eugène Ducretet, pionnier français de la radio",
Auto édition J.C Montagné 1998. La présente contribution s'attache non directement à
l'homme Ducretet mais à ses fabrications. Elle s'adresse à des lecteurs déjà
familiers de l'histoire de l'invention de la Télégraphie sans Fil et risque de
paraître quelque peu obscure pour les autres. Avant d'aborder la lecture de
cette page, il est donc utile de prendre connaissance d'un certain nombre de
points de repères historiques (en tapant Ducretet ou Ducretet-Popoff sur Google
on trouve de nombreux résumés dont certains sont très bien fait)
Un an après Marconi, Ducretet est le premier constructeur d'appareils
scientifiques français à se lancer dans l'aventure de la Télégraphie sans
Fil. Entre 1897 et le début des années 10, il produit et commercialise plusieurs générations successives
de récepteurs utilisant le radioconducteur (ou
cohéreur) inventé par Edouard Branly en 1890. Le nombre total d'appareils
fabriqués est inconnu mais l'on peut penser qu'il ne dépasse guerre quelques
centaines de pièces, dont fort peu ont survécues. Il règne actuellement un
certain flou artistique autour de ces appareils dans la communauté des
collectionneurs et des musées. Un récepteur dont on montrera ici qu'il n'est
pas antérieur à 1907 est présenté par le musée de Radio-France comme : "Le
second appareil utilisé par Eugène Ducretet lors des expériences du 5
novembre 1898". Un autre appareil qui figure dans une célèbre
collection française est présenté comme celui "qui a servi à la
liaison Tour Eiffel-Panthéon". S'agissant d'un appareil destiné à la
répétition de l'expérience fondamentale de Branly, cette assertion est manifestement erronée.
Pendant que certains travaillent à rattacher leur appareil à la date
symbolique des expériences de la Tour Eiffel, d'autres semblent ignorer qu'ils
sont en possession du graal. Il y a tout lieu de croire que l'appareil détenu
par l'Institut Catholique de Paris est sinon celui qui a servi le 5 novembre, du
moins un modèle identique. Pourtant, il n'est absolument pas présenté comme
tel.
La lecture attentive des notices publiées par Eugène Ducretet entre
novembre 1898 et 1914 et la mise en perspective des quelques appareils
survivants permet de rétablir certaines vérités. Parce qu'il faut bien classer d'une manière ou d'une
autre, je distinguerai ici très schématiquement 4 catégories
d'appareils : Les premiers appareils expérimentaux, les appareils à relais pour grandes
distances, les radiotéléphones, les appareils à vocation pédagogique. J'exclurai de cette présentation
certains appareils spéciaux réalisés par Eugène Ducretet à un seul
exemplaire pour le compte d'Edouard Branly et qui n'ont jamais été
catalogués.
Pour réaliser cette étude, j'ai du emprunter un certain nombre de photos.
Dans la mesure ou les sources sont toujours citées, j'ose espérer que
personne ne m'en voudra.
LES APPAREILS EXPÉRIMENTAUX |
Les trois appareils présentés ci-dessous ne sont pas
seulement des prototypes de recherche. Ils ont effectivement été
proposés à la vente par Eugène Ducretet et ont très certainement
été fabriqués en plusieurs exemplaires. Ils sont qualifiés
"expérimentaux" parce qu'ils ont été conçus et réalisés
avant 1899, à une époque ou certaines applications futures de la TSF
étaient déjà pressenties mais aucune encore réalisée. Les clients
de Ducretet étaient alors des chercheurs, tels Edouard Branly ou
Camille Tissot qui, à force d'essais et de tâtonnements, vont
contribuer à améliorer les performances des récepteurs et à rendre
possibles ces applications. |
Ensemble
émetteur/récepteur à miroir parabolique. Cet appareil a été
présenté par Eugène Ducretet à la Société Française de Physique
le 19 novembre 1897. Le miroir d'émission reçoit un petit oscillateur
de Hertz. Le miroir de réception reçoit un radioconducteur Branly à
réglage avec tube en ivoire. Le récepteur relié à une sonnette, cet
ensemble permet de mettre en évidence la présence des oscillations électriques
et leur conditions de propagation. A la suite de sa présentation, cet
appareil est proposé à la vente durant plusieurs années au titre
d'appareil pédagogique. On le retrouve dans la notice "Télégraphie
Hertzienne sans fil" de novembre 1898 et dans le "Tarif
raisonné des appareils pour la démonstration des oscillations
électriques" de mars 1901 (300F pour l'appareil complet). On
le retrouve encore dans une notice très tardive (vers 1911/1912). Aucun survivant localisé. |
Récepteur présenté à l'académie des sciences le 2 mai 1898
: Cet ensemble est composé principalement d'un récepteur à radio
conducteur Branly à réglage en ivoire avec décohéreur automatique type
Popoff, d'un relais sensible polarisé,
d'un enregistreur morse automatique Ducretet spécial TSF et d'une
sonnette d'appel. Le 17 décembre 1897, Eugène Ducretet réalise une
expérience de Télégraphie sans fil devant le Président de la
République Félix Faure. Suivront, au cours du premier semestre 1898, des
expériences entre la rue Claude Bernard et le Panthéon. On ignore si cet
appareil est celui qui a servi à ces démonstrations (les notices ne sont
pas claires à ce propos). L'appareil figure encore dans le catalogue
général Ducretet de 1899. Il est alors proposé à la vente au prix de
770 F et présenté comme : "Un appareil convenant aux grands
établissements universitaires" |
On
doit à cette photo la croyance selon laquelle ce récepteur est
celui qui a servi lors de la célèbre expérience de transmission entre
la Tour Eiffel et le Panthéon le 5 novembre 1898. En fait le cliché
est postérieur de plusieurs années et il est extrait d'un petit film
réalisé probablement dans un but commémoratif. En novembre 1898, les
tentatives de réception à la Tour Eiffel n'ont donné aucun résultat.
C'est uniquement dans l'autre sens (émission à la Tour et
réception au Panthéon) que l'expérience a été probante. La lecture
attentive du compte rendu réalisé par le professeur Mascart, qui a
assisté à l'expérience pour le compte de l'académie des
sciences, confirme qu'une tentative de réception depuis la tour a
bien été réalisée, mais elle permet aussi de comprendre que
l'appareil utilisé n'était pas celui-là : "L'appareil
récepteur...était semblable, comme organes, à celui qui est décrit
aux comptes-rendus du 2 mai dernier, mais rendu très portatif".
La notice Ducretet "Télégraphie hertzienne sans fil" de
novembre 1898 vient confirmer ces propos (voir l'appareil suivant). |
Cette petite planchette, conservée au musée Branly (Institut
Catholique de Paris) est l'élément détecteur du récepteur ci-dessus.
Elle est datée 1898. Le décohéreur automatique suivant Popoff n'est
rien de plus qu'un petit mécanisme de sonnette. Le tube cohéreur
comporte un réglage de pression (un perfectionnement qui caractérise
tous les cohéreurs Ducretet pour grandes distances réalisés par la
suite). Le corps est en ivoire, matériaux qui sera ensuite remplacé
par l'ébonite puis par l'écaille (noire ou transparente suivant les
modèles). Il s'agit du seul modèle survivant connu de ce type. Source
: http://museebranly.isep.fr/news.php |
Récepteur modèle portatif (compte rendu de l'académie des
sciences du 7 novembre 1898). Cet appareil est présenté en
détails dans la notice de novembre 1898 "Télégraphie
Hertzienne sans fil" et il est bien précisé que c'est
celui-ci qui a fait l'objet d'un compte rendu à l'Académie des
Sciences à la suite des expériences du 5 novembre. Il n'est donc pas
douteux que l'on a affaire ici à l'appareil utilisé au Panthéon avec succès
puis à la Tour Eiffel sans succès. Le récepteur reprend les
éléments du modèle ci-dessus, à savoir le mécanisme de sonnette, le
tube à limaille en ivoire et le relais sensible. Les résistances
auxiliaires servent, selon E Ducretet, "à éviter les
étincelles d'extra-courant de rupture". Il s'agit de
résistances liquides qui ne seront pas reprises sur les appareils
suivants. Le coffret comprend les piles qui sont placées dans un casier
spécial accessible depuis l'arrière. Ducretet ne donne pas
d'indications très claires à propos du relais. Il se contente de
préciser qu'il s'agit : "d'un relais télégraphique très
sensible" qui est placé verticalement. Un exemplaire de ce
modèle de récepteur (ou un appareil très proche) à été livré au lieutenant de vaisseau Tissot
en janvier 1899, pour ses premières expériences de Télégraphie sans Fil, réalisées
dans la rade de Brest (voir l'excellent site : http://www.camille-tissot.fr/
: Le compte rendu des expériences réalisées par Tissot durant l'hiver
1899 semble montrer un fonctionnement très déficient. Le décohéreur
est qualifié de "primitif" et le cohéreur est "peu
sensible et d'un fonctionnement irrégulier"). L'appareil est encore proposé à la vente, au
prix de 300 F, dans le catalogue général Ducretet de 1899 (non daté).
Il est alors curieusement qualifié de "Récepteur au son".
Cependant il est précisé dans ce même catalogue qu'un nouveau type
1899 est désormais disponible au prix de 345 F. Cet appareil n'est pas
représenté mais c'est pourtant lui qui est "recommandé" par
le constructeur (on le remarquera par la suite, Ducretet avait tendance
à conserver dans ses catalogues les représentations d'appareils qui
n'étaient plus fabriqués depuis longtemps, faute d'avoir fait
réaliser les gravures des appareils effectivement disponibles). |
Ce récepteur, conservé au musée Branly (Institut Catholique de
Paris), est classé sur le site du musée parmi les "objets de
moindre importance". Il s'agit pourtant bien du même appareil
que ci-dessus, à savoir le type exact de récepteur utilisé lors des
expériences du 5 novembre 1898. C'est aussi probablement le plus ancien
récepteur de Télégraphie sans Fil français survivant...une
pièce négligeable en effet. Ducretet entretenait d'excellentes
relations avec Edouard Branly pour qui il réalisait de nombreux
appareils spéciaux. Ce récepteur est en très bon état d'origine (il
manque juste une résistance) et
n'a pas été modifié (perfectionné) par le savant. Il est peu
probable qu'il ait été acheté dans un but de recherche, c'est
peut-être même un don de Ducretet, une manière de rendre hommage à
l'inventeur du radio-conducteur. Il doit sa survie aux conditions
particulières de sa conservation dans un paisible laboratoire de
recherche. Les appareils de Tissot, cent fois modifiés, n'ont pas eu
cette chance. Source : http://museebranly.isep.fr/news.php |
Élément
rajouté en mai 2010. Cet appareil conservé au musée des communications
de St Petersbourg est pratiquement identique au modèle ci-dessus. Il est
daté de 1899 par le musée. A noter, un léger perfectionnement sous la
forme de 2 shunts visibles de part et d'autre de l'ensemble décohéreur.
A noter aussi l'absence de la seconde résistance liquide comme dans le
cas précédent. Peut être est-ce normal finalement. Source : http://r150asp.ru/admin/data/1/3/Popov_book_28_11_08.pdf
P57. |
LES RECEPTEURS POPOFF/DUCRETET
A RELAIS POUR GRANDES
DISTANCES |
En 1899 Eugène Ducretet entre directement en
compétition avec la puissante compagnie Marconi sur le marché naissant
de l'équipement radio des navires de guerre. Si l'on excepte quelques
appareils fabriqués par Rochefort, dont on a pas trouvé de
représentations, il demeure durant plusieurs années le seul
constructeur français pour ce type de matériels. Les appareils à
radio conducteurs pour grandes distances fabriqués par Ducretet entre
1900 et 1907 portent tous la marque "Popoff-Ducretet". Les
relations entre les deux hommes n'étaient pas de l'ordre de
l'association. Il s'agissait plutôt d'une collaboration informelle.
Contrairement au Radiotéléphone Popoff/Ducretet, que je présenterai
plus bas, les récepteurs à relais sont essentiellement l'œuvre de
Ducretet. La référence au nom de Popoff sur les notices de
présentation des appareils tient d'une part à l'usage du décohéreur
automatique inventé par Popoff en 1895 et pour lequel Ducretet payait
des royalties, d'autre part à des motivations commerciales (La marine
impériale Russe était le principal débouché pour les appareils
Ducretet). Il est probable néanmoins que les nombreux échanges de
courriers entre les deux hommes ont largement contribué à améliorer
le fonctionnement des appareils. Destinés aux navires de guerre et aux
postes côtiers, ces récepteurs ont eu une vie brève et tumultueuse.
Ils étaient déjà très largement obsolètes en 1908. On a dénombré
seulement 6 survivants en incluant mon appareil et un récepteur
conservé en Russie dont l'origine Ducretet est incertaine. Pour deux d'entre eux au moins, la survie tient au fait qu'ils n'ont
jamais été utilisés à ce pourquoi ils avaient été conçus. |
Récepteur
Popoff-Ducretet à cohéreur et à relais modèle 1900-1901 : Cette
gravure est publiée pour la première fois en aout 1901 dans le "Guide
pratique de Télégraphie Hertzienne sans fil aux grandes
distances" de E.Ducretet. L'appareil est présenté comme le "type
1900-1901". En fait, on trouve dans le catalogue général de
1899 (p198) la description d'un appareil qui semble très proche : "Il
comprend les mêmes organes (ndlr que le modèle 1898 ci-dessus)
mais disposés différemment avec la collaboration de M le Lieutenant de
vaisseau Tissot. Le radio-conducteur est muni d'une nouvelle monture et
d'un nouveau dispositif de frappeur Popoff, le relais est disposé
horizontalement...la boite de ce nouveau type est de forme
pupitre". La forme générale de l'appareil est donc
globalement définie des 1899 mais cette base va continuellement
évoluer jusqu'en 1904. En 1899 il est fait état d'une résistance par
lampe à incandescence qui n'est plus présente ici. Le relais utilisé
sur ce modèle 1900-1901 est semblable au modèle de 1898 mais
placé horizontalement. Au moment ou a été publiée la notice, il
existait déjà un autre modèle de relais amené à se substituer à ce
premier type (voir ci-dessous). Il est donc probable que
l'appareil proposé à la vente était déjà en août 1901
un peu différent de celui présenté sur la gravure. Aucun
appareil survivant de ce type n'est actuellement localisé. |
Ce dessin est issu de la même notice d'août 1901 et présente
l'appareil vu de coté. La boite est en laiton riveté et comporte 2
compartiments. La partie arrière est destinée aux piles. Le relais
n'est pas fixé à la boite, il est simplement posé sur un coussin
antivibratoire destiné à isoler l'appareil des trépidations quand il
est utilisé en mer ou dans les chemins de fer. Cette disposition est le
fruit de l'expérience acquise (le modèle ci-dessus, légèrement plus
ancien, n'a pas de coussin et les connections sont réalisées en fil
rigide) Le dispositif marqué "Sa" sert à maintenir en place
l'élément relais lors du transport. On remarque que ce relais est d'un
modèle différent de celui présenté ci-dessus. Il s'agit en fait d'un
"relais magneto à cadre mobile Siemens-Ducretet" qui est
largement décrit dans la notice de 1901 et équipera les récepteurs des
années suivantes. |
Ce dessin est issu de la même notice et présente le schéma de
principe de l'appareil. Le relais semble être ici du premier modèle. Le
radio-conducteur à réglage est très semblable au modèle 1898 mais
son corps est en ébonite. La résistance "Re" est dite "résistance
rectiligne céramique avec barreau en silicium", elle remplace
la résistance liquide utilisée en 1898 et la résistance par lampe à
incandescence mentionnée dans le catalogue général 1899. La résistance Re' semble rajoutée par
rapport à l'appareil ci-dessus. Le décohéreur automatique est
beaucoup plus évolué que sur les modèles expérimentaux de 1898, dont
Camille Tissot avait pointé les limites au cours de ses essais de
l'hiver 1899. Il comprend désormais 2 réglages, l'un pour contrôler
la course du marteau décohéreur (V), l'autre pour maîtriser la
dureté des impulsions (Te). La position du décohéreur est
inversée par rapport au modèle de la gravure, mais il ne s'agit
peut-être que d'une commodité pour la réalisation du dessin. |
Élément
rajouté en mai 2010. Cet appareil est conservé par le musée de la
communication de St Petersbourg. Il est daté de 1900 par le musée et
présenté comme un récepteur fabriqué par les ateliers Popoff de
Kronstadt. On apprend à la lecture du catalogue édité par le musée en
2008 qu'Alexander Popoff avait crée en 1900 un petit atelier destiné à
la maintenance des récepteurs Ducretet et à la fabrication sur place de
nouveaux appareils. Le but était semble t'il de réduire la dépendance
de la Russie vis à vis des constructeurs étrangers. Cet atelier a
fonctionné de manière très artisanale jusqu'en 1910. La production ne
dépassait pas 10 appareils par an. Je ne me prononcerai pas de manière
définitive sur l'origine exacte du récepteur ci-contre mais il va de
soit que l'ensemble des composants est d'origine Ducretet et que la physionomie
générale est très proche du modèle 1900-1901 décrit ci-dessus. Le
relais est du type Siemens-Ducretet dans sa version à tige de réglage extérieure.
Le socle est curieusement moins épais que sur les autres versions et
semble être en maillechort. La boite est en fer (ce qui explique qu'elle
soit peinte). Le tube à limaille est en écaille transparente (donc normalement
pas antérieur à 1903 si on se fie au notices Ducretet). L'élément à curseur sur la droite est une
curiosité que l'on a retrouvée nul part dans les descriptions des
catalogues Ducretet. Il s'agit vraisemblablement d'un "réducteur de potentiel",
élément qui est normalement situé à l'extérieur sur les constructions
Ducretet. Source : http://r150asp.ru/admin/data/1/3/Popov_book_28_11_08.pdf
P78. |
Récepteur Popoff-Ducretet à cohéreur et à relais, modèle
1902 : Le fascicule "Addition au guide pratique de
télégraphie hertzienne sans fil aux grandes distances", publié
en 1902 (date inconnue), présente un appareil pratiquement identique au
modèle précédent. Le récepteur sur la couverture est celui du guide
pratique de 1901 (Ducretet n'a pas jugé utile de faire réaliser une
nouvelle gravure). Le schéma de principe présente de minuscules
changements au niveau du câblage des résistances Re, Re'. Le tube du
radio conducteur est maintenant "En bois dur rendu hydrofuge par un
vernissage convenable". Aucun survivant recensé. |
Récepteur
Popoff-Ducretet à cohéreur et à relais, modèle 1903-1904 :
Cet appareil est le plus ancien récepteur Ducretet pour grandes
distances connu à ce jour. Il a le mérite d'être en excellent état
d'origine et est détenu par le Musée de la civilisation de Montréal
au Canada. Il a été acheté neuf auprès d'Eugène Ducretet par
l'abbé Henri Simard, responsable du séminaire de Québec, dont la TSF
était l'une des principales marotte. Il a survécu durant un siècle
dans les collections historiques du séminaire. Comme on le voit, ce
récepteur présente de nombreuses différences avec les modèles de
1901-1902 présentés ci-dessus et quelques points communs avec les
récepteurs de 1905-1906 décrits plus bas. Ces éléments de
comparaison m'amènent à conclure que l'on a très probablement affaire
à un appareil des années 1903-1904. La position du décohéreur sur la
droite est en accord avec les schémas de principe de 1901-1902 ce qui
laisse penser que le décohereur était déjà à droite en 1901-1902 et
que la représentation à droite n'était pas seulement une facilité
pour le dessin ( contrairement à ce que laisse penser la gravure
représentant un modèle de 1901 probablement antérieur). Par rapport au modèle de 1902, il y
a une résistance en plus et les inverseurs sont d'un autre type. La
notice de novembre 1906 situe l'apparition du récepteur à frappeur
indépendant en 1905, ce qui laisse supposer que ce modèle est antérieur.
Les 2 grandes résistances ainsi que les inverseurs sont néanmoins du
même type que sur les récepteurs 1905-1906 (les photos de ce modèle m'ont
servi de base pour réaliser les inverseurs de mon appareil). Le relais
est du type Siemens-Ducretet dans sa variante avec tige de réglage
placée au dessus du socle. La base antivibratoire du relais est une
plaque de caoutchouc non traité ou teinté (d'ou la couleur blanche).
La boite est peinte en noir (peut-être pas d'origine). Sur la droite on
remarque un petit tube en laiton destiné à recevoir un tube cohéreur
de rechange ainsi qu'un outil ayant pour fonction le nettoyage de l'intérieur
des tubes (on retrouve ces éléments sur les appareils postérieurs).
(Source : http://www.smq.qc.ca) |
La gravure
ci-contre est extraite de la " 2e addition au guide pratique de
Télégraphie Hertzienne sans fil aux grandes distances", datée
de février/mars 1904. L'appareil est présenté comme un modèle
1903/1904 et l'on remarque de nombreuses similitudes avec le modèle
survivant ci-dessus : les 2 résistances en boîtier bois, la tige de réglage
du relais. Il y a néanmoins une résistance en plus (mais peut-être se
situe t'elle de l'autre coté du panneau de bois sur le modèle survivant)
et les inverseurs sont du modèle déjà visible sur les appareils de
1901/1902 (probablement le même que sur le radio téléphone
Popoff-Ducretet présenté plus bas). On a ainsi quelques raisons de
penser que la gravure figure un appareil légèrement antérieur au
survivant canadien. |
Elément
rajouté le 18/05/2013 : Ce récepteur Popoff Ducretet figure
depuis peu sur la page Wikipédia en français consacrée au cohéreur de
Branly. L'appareil est localisé au Musée d'Histoire de la mer noire de
Sébastopol. Beaucoup de similitudes avec l'appareil canadien ci-dessus.
Seule différence notable, les inverseurs situés sur la gauche sont d'un
modèle que l'on a retrouvé nulle part ailleurs dans la production
Ducretet. A noter également, la frappe indirecte du marteau sur une
petite plaquette située en dessous du tube à limaille (ce dernier est
manquant). La trace d'une plaque rectangulaire (disparue) en haut de la
planche verticale confirme qu'il s'agit bien d'un appareil Ducretet et non
d'une production de l'atelier Popoff de Kronstadt. |
Elément rajouté le 12/02/2016 : Ce récepteur Popoff
Ducretet est apparu récemment sur une page web russe consacrée à A
Popoff. Il est localisé au musée de la communication A Popoff de St
Petersbourg et daté 1904 sur cette page. L'appareil est très similaire
aux 2 modèles ci-dessus, à l'exception des inverseurs de gauche qui,
cette fois ci, correspondent à ceux qui sont représentés sur la "2e addition au guide pratique de
Télégraphie Hertzienne sans fil aux grandes distances", datée
de février/mars 1904.
Le document complet est visible ici : http://www.nsmu.ru/student/pr_education/doc/Radioo.pdf |
Récepteur
Popoff-Ducretet à cohéreur et à relais, modèle 1905-1906 : Cet
appareil apparaît pour la première fois dans la notice N°140 de novembre
1906 (Notice complémentaire aux guides pratiques de E. Ducretet)
ou il est présenté comme un "modèle 1905-1906".
L'évolution est considérable par rapport au modèle précédent. Le
décohéreur automatique est désormais installé sur un socle
indépendant entièrement réalisé en maillechort (C'est, selon Eugène
Ducretet, ce qui le distingue des appareils de 1903-1904) L'appareil comporte
maintenant 3 réglages dont un dispositif à crémaillère destiné à
commander le déplacement vertical des bobines. La boite, qui n'est pas
représentée sur cette gravure mais mentionnée dans la notice, est beaucoup plus grande mais elle ne
comporte pas de logement pour les piles à l'arrière. Ces dernières
sont dorénavant placées à l'extérieur, les connections se situant en
haut du panneau vertical. On retrouve les inverseurs (maintenant fixés
sur une plaquette d'ébonite), les résistances
et surtout le relais à cadre mobile Siemens-Ducretet du modèle
précédent (avec une petite différence de fabrication car la molette
de réglage "B" est maintenant noyée dans le socle en
laiton). La notice précise que la frappe du marteau décohéreur
est indirecte. Celui-ci entre en contact avec une petite plaquette
d'ébonite située sous le cohéreur. On remarque ce dispositif sur le
schéma de principe ci-dessous mais il n'est pas présent sur le modèle
de la gravure, pas plus que sur les 2 appareils de ce type survivants.
Le tube du cohéreur est en écaille transparente, dite "incassable"
par le constructeur. Un tube en écaille noire sera aussi disponible par
la suite mais il n'est pas encore mentionné dans cette notice. |
Le
schéma de principe de l'appareil, publié dans cette même notice de
novembre 1906, laisse apparaître quelques différences par
rapport à la gravure ci-dessus. En plus du dispositif de contact
indirect du marteau, On note une légère
modification au niveau de la prise femelle du "collecteur/radiateur
Ca", c'est à dire de la prise d'antenne . Dans le cas ci-contre, la prise est réalisée en 2
parties isolées, une disposition commune avec les récepteurs plus
anciens. Comme indiqué dans la notice de 1901 : "En enlevant la
fiche L, pour la mettre au transmetteur, on coupe automatiquement le
circuit du radioconducteur et on empêche le fonctionnement du
récepteur pendant la transmission". Cette disposition ne se
justifie plus dans le cas de cet appareil puisque le cohéreur est
relié à la prise par un fil souple facilement détachable qu'il suffit
de débrancher pour obtenir le même résultat (la notice de novembre
1906 mentionne d'ailleurs cette procédure). Le modèle de la gravure a
renoncé ,semble t'il, a cette prise en 2 parties isolées, de même que l'appareil
survivant (un peu plus tardif) du musée de Radio-France. J'y ai moi
aussi renoncé pour reconstituer mon appareil (d'autant plus facilement
que je ne disposait pas de modèle à copier). On peut déduire de cette
différence que le dessin ci-contre est vraisemblablement un peu plus
ancien que la gravure ci-dessus. |
On l'aura compris à travers les descriptions ci-dessus,
les récepteurs à relais Popoff-Ducretet, construits à l'unité ou
presque, étaient tous ou presque tous différents, au point que 2
gravures figurant à priori le même modèle dans une même notice
laissent entrevoir de microscopiques évolutions. Mon appareil,
reconstruit principalement d'après les informations contenues dans la
notice de novembre 1906, vise à approcher, au plus près qu'il soit
actuellement possible, un appareil qui a effectivement existé (l'auteur de la
gravure disposait d'un modèle, ou au moins de la photo d'un modèle et
l'on a d'autre choix que de présumer qu'il en a reproduit l'image fidèlement
).
Cet appareil n'est pourtant qu'une variante parmi d'autres des récepteurs
à cohéreur pour grandes distances construit par la maison Ducretet en
1905-1906. Si un appareil entièrement d'origine vient à être exhumé
un jour il présentera assurément avec le mien des différences, liées
bien entendu pour certaines aux approximations et interprétations inévitables de la
reconstitution (on a discuté ce point à la page précédente) mais aussi
pour une large part aux aléas d'un mode de fabrication aux antipodes de
la standardisation.
|
Cette publicité est parue dans "L'illustration" en 1931.
Elle présente un récepteur Ducretet classique, connu dans le monde de
la collection sous le nom de "boite à outils", qu'elle met en
perspective avec le récepteur à relais modèle 1905-1906. La mention
"1898" est bien entendu erronée. Il est possible que l'agence
de publicité en charge de ce travail ait jugé ce modèle plus
photogénique que l'appareil de 1898. A l'époque ou parait cette
"réclame" Ducretet est la propriété de Thomson. Fernand
Ducretet est décédé depuis 3 ans et Ernest Roger a passé la main. La
mémoire de l'entreprise Ducretet des temps "héroïques"
était déjà peut-être passablement évaporée.
|
Élément
rajouté en mai 2010. Cet appareil est détenu par le musée des
communications de St Petersbourg et daté de 1904 dans le catalogue de
2008. Il est extrêmement proche de celui qui est présenté dans la
notice de novembre 1906. On note cependant quelques différences. La
première d'entre elles tient au matériaux utilisés. En effet, alors que
la notice parle d'appareils en maillechort (ce qui est confirmé par mon
appareil et par celui du musée de Radio-France), le décohéreur est ici
entièrement réalisé en laiton. Les bornes du tableau de commande sont
également en laiton. Certaines parties métalliques sont peintes en noir
(colonne arrière du décohéreur, prises femelles T et A) ce qui laisse
penser qu'elles sont réalisées dans un matériaux sujet à oxydation
(fer ou acier). Le relais est le même que sur l'appareil de 1901
présenté plus haut (donc différent de la notice). Autre fait troublant,
la boite est plus courte de 35 mm que sur mon appareil et que sur la
gravure de 1906 (taille sur la gravure déterminée en prenant pour
repère les éléments connus, relais et base du décohéreur). Tout cela
confirme le caractère extrêmement artisanal de ces fabrications. A
partir de 1904, Ducretet est sérieusement concurrencé par Marconi et
surtout par Slaby-Arco (Téléfunken) pour l'équipement des navires de
guerre russe. Les appareils de ce type sont probablement les tout derniers
livrés à la Russie par le constructeur français. Source : http://r150asp.ru/admin/data/1/3/Popov_book_28_11_08.pdf
P60 |
Récepteur Popoff-Ducretet à cohéreur et à relais, dernier
modèle : (photo extraite de Jean Claude Montagné, "Eugène
Ducretet, pionnier français de la radio", déjà cité. La
photo complète présente Eugène Ducretet à coté du récepteur et de
son enregistreur automatique de Morse, elle est datée par Eugène
Ducretet lui même "Xbre 1907" (?). Cet
appareil présente des caractéristiques très proches du modèle
1905-1906 ci-dessus mais il en diffère par certains éléments de
présentation. 2 résistances sont désormais fixées à la monture du
décohéreur automatique (c'est cette différence qui m'a amenée à
reproduire mon tableau arrière suivant les spécifications de 1905-1906
et non suivant les spécifications de ce modèle, dont il existe un
survivant). Le tableau arrière comporte une grande plaque d'ébonite
sur laquelle sont fixés les composants. Les résistances sont
semblables à peu de choses près à l'appareil ci-dessus mais les
inverseurs sont d'un modèle différent, de type "couteaux",
à-priori beaucoup plus performants pour se prémunir des mauvais
contacts. Le montage sur ébonite et les inverseurs "couteaux"
se retrouvent sur les récepteurs à double détecteur électrolytique
Ducretet qui sont présentés pour la première fois sur la notice de
novembre 1906. Cette analogie permet de penser que l'appareil est
contemporain (fin 1906-début 1907). Ce modèle n'a jamais été
catalogué en tant que tel. Il figure néanmoins sur une gravure dans
une "Notice illustrée de Télégraphie et Téléphonie sans
fil" Ducretet et Roger de 1914, p 40. Cette gravure présente,
posés dans un meuble, divers appareils de réception Ducretet dont le
double détecteur électrolytique et un dispositif d'accord en spirale
(il est probable que la gravure est beaucoup plus ancienne et
qu'elle figure déjà dans d'autres notices que je ne possède pas). La
légende renvoie à une autre partie de la notice ou est reproduite la
gravure du modèle 1905-1906 ci-dessus. Cet appareil n'est donc pas
considéré par Ducretet comme un modèle spécifique mais seulement
comme une évolution, sans doute la dernière, du modèle 1905-1906 (dont il importe
peu de faire état dans une publication car il s'agit fondamentalement
du même appareil). Comme on l'a vu, le modèle 1905-1906 est
représenté sans sa boite sur la notice de novembre 1906. Cette photo
constitue la seule représentation connue de la boite. Elle m'a été
utile pour la restauration de mon appareil malgré sa piètre
qualité. |
Cet
appareil figure au Musée de Radio-France et constitue à mon sens la
pièce maîtresse de cette très impressionnante collection. Il provient
de la succession Ducretet, comme la plupart des pièces antiques du
musée, et n'a donc jamais subit les aléas du service sur les navires
de guerre. En 1907, les appareils à cohéreurs étaient déjà
passablement obsolètes face aux détecteurs électrolytiques de Ferrié
et aux détecteurs magnétiques utilisés par Marconi. Il doit s'agir
d'un invendu, peut-être même de l'appareil ci-dessus qui aurait entre
temps perdu sa boite et connu quelques modifications au niveau du
relais. Le relais présenté ici à perdu sa base en laiton, remplacée
par une sorte de base antivibratoire dont j'ignore la nature faute
d'avoir pu l'examiner en détails (le musée est fermé depuis 2007 et
ne rouvrira pas avant de nombreuses années). la base est fixée à la
planchette inférieure et les connections sont réalisées en fil
rigide, comme sur les premiers appareils de 1898/1900. Dans cette
configuration, ce récepteur est peu adapté à un usage comme poste
volant, à bord des navires ou des chemins de fer. Il s'agit plus
probablement d'un appareil destiné à un usage de poste fixe, dans les
locaux de l'entreprise Ducretet, rue Claude Bernard à Paris. Le tube du
cohéreur est en écaille noire. Le musée de Radio-France s'obstine à
présenter ce récepteur comme : "Le deuxième récepteur à
cohéreur fabriqué par E.Ducretet, utilisé lors de la liaison
Panthéon-Tour Eiffel, le 5 novembre 1898". Cette assertion est
bien entendu erronée (d'autant qu'il s'agit en fait d'une liaison
Tour-Eiffel/Panthéon). Elle trouve peut-être son origine dans la
publicité pour la "Boite à outils", parue en 1931, qui
présente déjà cette erreur. A la fin des années 60, quand le musée de
Radio-France a ouvert ses portes, l'histoire de la radio n'avait pas
encore fait l'objet de recherches sérieuses. Les quelques écrits
disponibles à cette époque (Robert Franc "Eugène Ducretet",
éditions du Tambourinaire, 1964) comportent beaucoup d'erreurs
comparables qui, à force d'être reproduites deviennent des
quasi-vérités. Le 3 mars 1908, Ducretet solde le compte de royalties à
madame Popova, veuve d'Alexander Popoff (décédé en 1906). Il ecrit
alors : "Le brevet français va être abandonné car les postes
actuels ne sont plus les mêmes, en accord avec Mr Popoff" (J.C
Montagné, P50). On peut considérer qu'a cette date tout le monde
s'accorde pour dire que l'époque des récepteurs à cohéreurs et à
relais est révolue. Source photo : "Musée de Radio-France, les
plus beaux objets", Edition Radio-France, 1996. |
LE RADIOTELEPHONE POPOFF/DUCRETET |
Dans
la saga des cohéreurs Ducretet, le Radiotéléphone Popoff-Ducretet est
un cas à part car il repose sur des principes de fonctionnement très
différents. Lors du congrès d'électricité de Paris en 1900,
Alexander Popoff présente un mémoire mettant en évidence les
avantages pratiques de la méthode radio-téléphonique appliquées à
la télégraphie sans fil aux grandes distances. L'appareil concu par
Popoff est fabriqué par Ducretet et présenté à l'académie des
sciences en décembre 1900. Il permet d'obtenir des résultats aux moins
équivalents aux récepteurs à relais moyennant la mise en oeuvre de
moyens beaucoup plus simple. En effet, en introduisant directement un
téléphone dans le circuit d'un radioconducteur spécial et d'une pile,
il est possible de recevoir des signaux hertziens à grande distance au
son. Ce système permet de supprimer le relais et le décohéreur
automatique. En avril 1901, ce récepteur va être à l'origine du
premier sauvetage maritime réussi grâce à la Télégraphie sans Fil
dans le golfe de Finlande, démontrant ainsi de manière irréfutable l'intérêt
de cette nouvelle technologie. Si l'on se fie aux notices Ducretet, le
Radiotéléphone Popoff-Ducretet a été fabriqué au moins jusqu'en
1906. Il ne semble pas avoir subit au cours de ces années de
modifications notables. La boite comprend à l'avant 2 écouteurs
téléphoniques et un support destiné à fixer le détecteur quand
l'appareil est au repos. A l'arrière, un casier spécial est prévu
pour les piles. |
Le
schéma de principe ci-contre est extrait du "Guide pratique de
Télégraphie Hertzienne sans fil" publié en aout 1901.
L'élément central du système est le cohéreur autodécohérant
inventé par Alexander Popoff. Il est composé de 6 fines aiguilles
d'acier reposant aux extrémités sur des bandes de charbon dur formant
ainsi un contact imparfait. Un petit réceptacle fixé au corps du
détecteur contient un élément dessiccateur car il est important de
préserver le charbon de toutes traces d'humidité. L'appareil au
repos présente une conductivité plus importante que les cohéreurs
ordinaires. Ainsi, ce récepteur n'est pratiquement utilisable qu'aux
grandes distances car "l'autodécohésion" ne se produit
parfaitement que lors de la réception de signaux hertzien
très faibles. De ce fait, Ducretet préconise l'utilisation du
radiotéléphone uniquement dans les cas ou l'on a dépassé la limite
de sensibilité du récepteur à relais. |
La notice Ducretet de novembre 1906 présente un nouveau type de détecteur
Popoff-Ducretet, qui peut être monté a volonté dans la monture
prévue pour le détecteur classique. Il est composé de grains de
charbon dur mobiles dans lesquels plongent 2 tiges métalliques très
fines. En faisant varier la longueur des tiges introduites dans les
grains de charbon on peut régler la sensibilité du radioconducteur.
Aucun détecteur de ce type n'est actuellement
recensé. |
Le radiotéléphone Popoff-Ducretet a été produit durant au moins 5
ans, vraisemblablement à plus de 100 exemplaires. J'ai recensé 5 survivants (Musée de
Radio-France, 2 dans des musées en Russie, 2 dans des collections privées). L'appareil ci-contre, dont il
manquait les écouteurs, a été vendu sur Ebay en avril 2009,
provoquant un certain émoi dans la communauté des collectionneurs. Les
écouteurs ont semble t'il été trouvés depuis. On connaît
en plus un appareil reconstitué dont seul le détecteur est authentique :
Les appareils connus sont tous globalement semblables. On note cependant
l'absence de la rotule du détecteur sur 2 d'entres eux (j'ignore s'il
s'agit d'une modification) et la présence d'un détecteur d'un modèle
inconnu sur l'un des exemplaires russes (catalogue 2008, P59). |
Élément
rajouté en mai 2010. Cet appareil détenu par le musée des
communications de St Petersbourg, daté de 1900 dans le catalogue de 2008,
serait une fabrication de l'atelier de Kronstadt. On reconnaît certains
éléments d'origine Ducretet (écouteurs, inverseurs) mais il y a
néanmoins beaucoup de différences avec les appareils fabriqués en
France, la principale se situant au niveau du détecteur. (cet appareil
n'est pas inclut dans les 5 survivants mentionnés ci-dessus, voir
catalogue 2008, P78). |
LES RÉCEPTEURS A VOCATION PÉDAGOGIQUE |
Parallèlement aux récepteurs pour grandes distances,
Eugène Ducretet produit, à partir de 1899, des appareils à cohéreur
à vocation pédagogique. Ces appareils sont destinés aux écoles et
aux universités et s'inscrivent dans la tradition de la maison Ducretet
qui, depuis longtemps déjà, fabrique toutes sortes d'instruments de
démonstration électriques et optiques pour l'enseignement. Sur ce
marché, Ducretet est loin d'être le seul fabricant français. Louis
Ancel, Jules Carpentier, Gaiffe et d'autres encore fabriquent à la
même époque des appareils comparables. Les modèles de Ducretet se
distinguent néanmoins par leur qualité de construction qui ne cède
rien aux récepteurs à usage professionnel. Contrairement à d'autres
appareils beaucoup plus légers d'aspect, vendus au titre de jouets
pédagogiques (E.Chomeau, Nilmelior...), certains sont éventuellement
en mesure, à condition d'être utilisés avec un relais adapté,
d'assurer un service sur longue distance |
Appareil
pour la répétition de l'experience fondamentale de Branly (1899-1901) :
Cet appareil apparaît pour la première fois sur une notice de juillet
1899 intitulée : "Radioconducteur de M Branly, appareil de
démonstration de E. Ducretet" Dans le "Tarif
raisonné des appareils classiques pour la démonstration des
oscillations électriques" de mars 1901, il est proposé au
prix de 50 F, auxquels il faut rajouter 55 F pour l'élément comprenant
un relais élémentaire, une sonnette et les piles, qui peut
éventuellement être remplacé par un galvanomètre. Ce modèle est
destiné à la démonstration de l'expérience fondamentale de Branly.
Il ne possède pas de décohéreur automatique. Pour décohérer le tube
à limaille et le mettre en état de détecter une nouvelle onde
hertzienne, il convient de donner un petit choc sur celui-ci avec le
maillet fourni avec l'appareil. Ce modèle ne permet donc pas la
réception de messages. Le tube à limaille comporte un réglage comme
sur les modèles pour grandes distances contemporains. Il se distingue
de ces derniers par son corps en verre et surtout sa taille, beaucoup
plus longue et son diamètre plus important. S'agissant de recevoir un
signal hertzien émit à quelques mètres, le radioconducteur n'a pas
besoin d'être extrêmement sensible. Ducretet préconise l'usage de
toutes limailles métalliques, perles d'acier, grains d'aciers
spéciaux. |
Le récepteur ci-contre, identique ou presque à celui de la
gravure, provient de la collection Marcel Cocset. Il ne s'agit bien
entendu pas de l'appareil des expériences de 1898, contrairement à ce
qui est indiqué sur le panneau explicatif. 3 appareils de ce type sont
actuellement recensés dans des collections privées (2 en France, 1 aux
Etats-Unis).
|
Appareil à décohéreur automatique Popoff Ducretet de
première génération (1901-1902) : L'appareil dont le schéma
de principe figure ci-contre est mentionné pour la première fois dans
le tarif raisonné de mars 1901 (déjà cité) ou il est proposé au
prix de 75 F (+ 55 F pour l'élément relais). Il fait l'objet d'une
notice additionnelle publiée en janvier 1902. La notice additionnelle
reproduit en première page la gravure du modèle ci-dessus (Ducretet
n'a pas jugé utile, comme souvent, de faire réaliser une nouvelle
gravure). Le relais est le même mais l'appareil comporte désormais un
décohéreur automatique Popoff-Ducretet. Il est préconisé pour les
conférences sur la télégraphie sans fil. Ce modèle peut en fait, au
choix, être utilisé comme le modèle simple ou pour la réception de messages.
Un commutateur spécial (le même que celui du radiotéléphone
Popoff-Ducretet) permet de couper l'alimentation du décohéreur. Le
circuit décohéreur comporte une résistance. Ducretet préconise pour
ce modèle l'emploi de limaille de nickel. La procédure de préparation
du tube est beaucoup plus sommaire que pour les récepteurs à grande
distance. Les pistons doivent seulement être nettoyés périodiquement
avec du papier émeri N°2. Il n'est nullement besoin ici d'obtenir le
poli miroir préconisé pour améliorer la sensibilité des tubes
utilisés sur grandes distances. |
Cet
appareil issu de ma collection est le seul survivant connu de ce type.
Le décohéreur automatique est très semblable à celui utilisé sur
les récepteurs Ducretet pour grandes distances contemporains (bobines,
monture) mais il ne comporte pas de réglage de dureté. La comparaison avec l'appareil
simple ci-dessus permet de noter d'autres différences. Les petites
antennes H/H' ne sont pas présentes ici, le tube à limaille est
légèrement moins long et la forme générale de la monture en bois est
différente.
|
Elément rajouté le 25/02/2016
Cette monture de cohéreur Ducretet à été trouvée récemment par un
collectionneur de l'est de la France. La planche verticale présente une
découpe différente du mien et l'on note aussi quelques différences
d'usinage au niveau du support en laiton des bobines. Plus curieux, le
marteau du décohéreur frappe le tube par le dessus (cad quand l'électro-aimant
est alimenté), une disposition que je n'ai retrouvé sur aucun autre
modèle de cohéreur Ducretet. Je n'ai malheureusement pas pu me porter
acquéreur de cet appareil...ce qui finalement n'est pas trop grave car le
compléter n'est pas gagné d'avance.
|
Une vue arrière de ce même décohéreur. |
Appareil
à décohéreur automatique Popoff-Ducretet de 2nd génération : Je
ne possède pas les notices de présentation de cet appareil et il m'est
donc bien difficile de le dater précisément. En fait, on peut
considérer que ce modèle de cohéreur a remplacé l'appareil ci-dessus
à une date indéterminée située entre 1903 et 1907. Certains des appareils
survivants portent la marque "E.Ducretet" qui confirme une
fabrication antérieure à 1908, d'autres la marque "F Ducretet et
E Roger" attestant d'une fabrication de 1908 ou postérieure (comme
l'exemplaire ci-contre, issu de la collection Marcel Cocset). C'est
semble t'il le moins rarissime des cohéreurs Ducretet car j'en ai personnellement
localisé plus de 10 exemplaires dans diverses collections autant
privées que publiques. Le tube
à limaille est d'un modèle spécifique, sans réglage et indémontable
car les extrémités sont serties. Il est possible que certains de ces
appareils aient été utilisés pour d'autres usages que la simple
démonstration. L'un des exemplaires connus est marqué d'une ancre
symbole de la Marine Nationale. Cet appareil est encore proposé à la
vente dans la "Notice illustrée de Télégraphie et Téléphonie
sans fil" N°181 de 1914, au prix de 60 F. Le tube à limaille seul
est vendu 9 F. Il est néanmoins peu probable que la fabrication ait
perdurée aussi longtemps. Cette même notice présente aussi le
récepteur à relais pour grandes distances modèle 1905-1906 et toute
une série d'appareils très largement obsolètes en 1914. |
Poste à relais, modèle des Écoles : Parallèlement
au récepteur ci-dessus, Ducretet propose à la vente un appareil
beaucoup plus sophistiqué qui comprend, installés sur une même
planche, un récepteur à cohéreur proche du modèle de démonstration
présenté ci-dessus et un relais à cadre mobile
Sièmens-Ducretet du type utilisé sur les récepteurs à grande
distance. Dans ce cas, le tube à limaille simple est remplacé par le
modèle à réglage avec corps en écaille (le même que sur le modèle
1905-1906). L'ensemble est enfermé dans une boite en verre formant
vitrine (ce qui permet de se passer éventuellement de la boite de protection du
relais, comme sur la gravure). Un appareil proche de ce modèle est détenu par le Musée de
Radio-France. Il en existerait un second
exemplaire dans une collection privée de l'Ouest de la France. La
mauvaise photocopie ci-contre est issue de la notice de 1914 déjà
citée. L'appareil y est proposé au prix de 295 F. Compte tenu de son
équipement, rien ne s'oppose à ce que cet appareil soit utilisé pour
des communications à grandes distances. |
L'appareil
ci-contre, détenu par le musée de Radio-France, est très proche de
celui de la notice mais en inversé. On remarque en particulier que la
molette de réglage du relais se situe à gauche, contrairement à toutes
les autres variantes connues ou figurant dans les notices (s'agirait il de
la commande spéciale d'un utilisateur gaucher?). Ce modèle est
parfaitement en mesure d'assurer un service sur grandes distances. Il est
néanmoins peu adapté à une utilisation en poste volant (marine, chemins
de fer) du fait de l'absence totale de caoutchouc amortisseur au niveau du
relais et des pieds. (source photo : CPM Musée de Radio-France) |
Cet appareil issu de la collection Marcel Cocset, équipé du tube
cohéreur à réglage, est probablement l'élément récepteur du
modèle ci-dessus. La plaque "Etablissements Ducretet" visible
à gauche est sûrement un rajout ultérieur car elle n'est pas antérieure à
1918. |
|